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mercredi 24 octobre 2018Portraits

Karawan, le phœnix de la cosmétique

Christine Delpal

Né de l’association de deux Français et de façonniers syriens, Karawan propose depuis une quinzaine d’années d’authentiques savons d’Alep fabriqués sur place dans la plus pure tradition. Les récents événements en Syrie ont malheureusement eu un impact sur la production de la marque, mais Karawan n’a visiblement pas dit son dernier mot…

Temps de lecture
~ 4 minutes

L’histoire de Karawan ne date pas d’hier.
Tout a commencé il y a 15 ans, quand Christine Delpal, ethnologue de formation, décide de partir faire sa thèse au Moyen-Orient.
Elle démarre alors un travail sur le souk d’Alep. En parallèle, elle officie également en tant que photographe professionnel free-lance, pour la presse, l’édition ou dans le cadre de projets culturels.
“Une ligne commune à toutes ces expériences est l’intérêt pour l’autre, pour le monde, avec un regard autant esthétique que social sur la beauté et la diversité qui le constitue”, raconte-t-elle.

Sublimer le patrimoine syrien

Après avoir passé un long moment à analyser et interviewer, Christine Delpal décide qu’il est temps pour elle d’arrêter d’observer et de commencer à agir. “Ces vies professionnelles ont aiguisé mon œil par la connaissance concrète de modes de vie très divers, tout autant qu’elles ont fait vivre en moi une somme d’inspirations esthétiques. Cependant, après 15 ans de voyage, d’écriture et d’expositions, la position d’observateur, d’analyste et de témoin ne me suffisait plus. Le désir de m’engager avec les populations rencontrées pour valoriser des savoir-faire d’exception, qui sont menacés par l’industrialisation et conduisent à une homogénéisation de la production, m’ont amenée à créer une entreprise avec Marc Carbonare, mon partenaire”, évoque-t-elle.

Effectivement, en plus de vouloir se lancer dans une expérience entrepreneuriale, Christine Delpal est également motivée par l’envie de participer au développement économique du pays.
Familière des ONG, elle se rend compte que les projets menés par ces organisations ne sont pas toujours pensés de façon globale.
Elle réalise alors que le commerce peut être un levier de co-développement tout aussi noble qu’un autre et surtout plus efficace.
Elle se rapproche donc de façonniers syriens et lance sa marque, en collaboration avec eux.

Pour la créatrice, pas question de dénaturer le savoir-faire syrien. Au contraire, elle explique que tout l’intérêt de Karawan repose sur “une attention particulière aux ingrédients naturels et aux textures nobles travaillées en détail et avec authenticité par la main de l’homme. Fruits d’une alliance entre une conception éco-design et les techniques issues de contextes locaux, nos produits affirment la marque d’un métissage. Ils sont ainsi porteurs d’histoires vraies, celle d’une dynamique de création partagée, faite de notre rencontre avec les savoir-faire de nos partenaires”.

La guerre et ses ravages

Entre 2004 et 2011, Karawan poursuit son petit bonhomme de chemin. La marque a même étendu son offre en proposant toute une gamme d’accessoires autour du hammam dans le but de valoriser et diffuser au maximum l’artisanat de la région.

Une avancée paisible jusqu’à l’enlisement du conflit syrien.
Comme une majeure partie de la population, Karawan fait les frais de la guerre.
Entrepôt brulé, containers volés, produits pillés, la marque connaît alors une passe difficile.
Christine Delpal évoque une rupture de stock de la marchandise, la perte de certains distributeurs, et par conséquent, une trésorerie mise à mal.

Renaître de ses cendres

Pourtant, il est hors de question pour elle de baisser les bras.
Elle décide de recommencer l’aventure, en repartant de zéro, avec le même partenaire. “Notre relation de confiance était solide et établie. Il a vu son entrepôt brûler, nous avons perdu avec lui des stocks de savons qui devaient nous arriver dans un container. Nous étions réellement engagés et solidaires avec lui. Notre souci a été, durant tout ce temps, de reconstituer avec lui une filière de qualité, sous son contrôle, avec des fournisseurs identifiés d’huiles d’olive et de laurier, avec le même process de fabrication du savon d’Alep. Il a fallu plusieurs années pour y arriver”, confie-t-elle.

Pour mener à bien la reconstruction de la marque, le partenaire local de Karawan est allé trouver refuge en lieu sûr, à 70 km de la frontière, côté turc.
Christine Delpal raconte s’être avancée sur un volume important de commandes afin de “justifier un engagement en amont d’identification des lieux possibles de production, des process, des ingrédients et des équipes à retrouver”.

La marque a investi dans des nouveaux moules en bronze inspirés de l’art oriental et a également fait appel à l’expertise des nez de Grasse afin de développer de nouvelles fragrances pour les savons. Depuis 2017, Karawan est de nouveau sur les rails et distribue depuis septembre 2018 ses nouveaux produits. “Les Syriens qui circulent maintenant entre la Syrie et la Turquie sont extrêmement actifs, et dynamiques pour contribuer à restructurer une activité économique locale, en lien avec leur tradition et leurs ressources agricoles, pour qu’elle perdure et fasse vivre leur famille”, conclut Christine Delpal.

JS
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