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mardi 21 janvier 2014Cosmétothèque

Vernis à ongles : la saga des applicateurs

© fotolia - L'Observatoire des Cosmétiques

L'application du vernis à ongles est une opération fondamentale pour la qualité finale du maquillage. L'accessoire indispensable de cette étape est le pinceau. Il a traversé le temps malgré de très nombreuses tentatives pour le modifier, mais il reste globalement le même. Jean-Louis Mathiez, expert en packaging cosmétique, nous en dit un peu plus.

Temps de lecture
~ 6 minutes

Produit de mode par excellence, le vernis à ongles est né aux États-Unis dans les années 30 avec la marque Revlon. Deux frères, les Revson et un ami chimiste, Charles Lachman, le L de Revlon, inventent le vernis à ongles opaque et pigmenté. C’est le début d’une aventure qui les conduira à bâtir un empire. Jusqu’àlors, le vernis était incolore ou légèrement teinté, et de mauvaise qualité. L’introduction de pigments colorés va apporter ce brin de gaité qui va faire toute la différence.

Plus tard, dans les années 50, Cutex se revendiquera comme "L’inventeur du vernis plastique", comme en témoigne une affiche publicitaire de l’époque. Cette marque existe toujours aux États-Unis. En Angleterre et en Espagne, elle est distribuée par Coty.

Réservée à l’origine à une élite, les stars hollywoodiennes, et déclinée en seulement quelques teintes (rose et rouge), le vernis se présentait dans un petit flacon en verre accompagné d’un pinceau indépendant, à l’image d’un encrier.
Que de chemin parcouru depuis …

Il doit aujourd’hui son renouveau grâce à la folie du Nail Art venue d’Asie dans les années 2000 et qui insuffle une créativité débridée et sans limite. Couleurs, graphisme, effets craquelés, métallisés, miroirs…., techniques professionnelles, jamais un produit de maquillage n’a connu une telle révolution.

Mais un élément reste essentiel : l’applicateur.
Du pinceau au stylo, en passant par l’imprimante pour les ongles, l’histoire de cet indispensable accessoire incite à la curiosité.

Le pinceau, l’indémodable objet de toutes les convoitises

Tout comme le bâton de rouge à lèvres est un symbole, le pinceau de vernis à ongles reste finalement l’applicateur optimal.

L’évolution du pinceau va se situer surtout au niveau des fibres. L’idéal serait d’obtenir les performances d’un pinceau d’artiste en fibres naturelles (soie de sanglier, poil de martre ou de blaireau), mais le coût de revient et la détérioration rapide due à l’imprégnation des substances constituant le vernis empêchent leur usage. N’oublions pas que le pinceau passe plus de temps dans le vernis qu’au dehors !

Les fibres sont donc très majoritairement en polyamide (nylon), quelquefois en polyester. Le matériau le plus couramment utilisé est le Tynex®, une fibre proposée par Dupont de Nemours, le grand chimiste américain. Cette fibre sert également à la confection de toute une série de brosses et d’applicateurs, comme les brosses à dents par exemple. Il existe plusieurs types de fibres et le choix est déterminant. C’est principalement sur ce critère que les qualités s’articulent.

De nombreuses tentatives visant à substituer les fibres par des embouts en mousse ou des spatules très souples (palettes dans le jargon) n’ont pas connu le succès escompté. Le pinceau et ses fibres de nylon semblent indétrônable !

Au contact du vernis, ces fibres réagissent et évoluent vers une souplesse optimale par imprégnation. En plus de la nature des fibres, leur diamètre, leur nombre, leur disposition jouent un rôle essentiel, de même que l’effilage (aiguisage de l’extrémité de la fibre).
Un pinceau peut compter de 400 à 1 000 fibres.

La fabrication des pinceaux est très technique et relève de nombreux brevets, dont plus d’une centaine rien que pour le groupe l’Oréal. Ils portent sur les mélanges de fibres, la forme de leur section (en étoile, en rectangle, torsadée), le traitement effectué pour mieux retenir le vernis, la présence de réservoir…où le pinceau double "empoilage".

Tentatives de rupture

Au regard des dernières décennies, on peut dire que le vernis à ongles a peu évolué en terme de packaging. Le flacon est toujours en verre (recyclable) même si de bonnes performances ont été obtenues avec une matière plastique transparente et résistante au solvant (PA Grivory de EMS, en Suisse).

Il semblerait que le verre reste le symbole absolu pour une préservation optimale des qualités du vernis (c’est la perception qu’en ont les utilisatrices).

Quant au pinceau, il a été optimisé au maximum, mais toujours sur le même modèle.

Mais les japonais de Mitsubishi (fabricant de stylos), fort de leur expérience en calligraphie, mettent au point, il y a plus de 20 ans, un stylo pour les ongles. La difficulté réside dans le fait que la formule de vernis doit sécher le plus rapidement possible une fois posée sur les ongles (exigence de la consommatrice), mais à l’opposé, il ne devrait pas sécher trop vite pour sa conservation…Un vrai casse tête pour les concepteurs du stylo à ongles ! La solution serait de re-diluer la formule, mais comment ? Les essais de stylos à vernis se sont avérés jusqu’à lors peu convaincants. Régulièrement, ils réapparaissent avec les mêmes contraintes.

Quoi qu’il en soit, une révolution est peut-être en cours avec l’imprimante pour les ongles.

La révolution de l’impression 3D

La venue des "nail bar" et du "nail art" en Europe a fait bouger les choses. Déjà très populaire outre-Atlantique, avec des marques professionnelles comme Sally Hansen, le maquillage des ongles connaît un bouleversement.

Tout récemment, plusieurs marques ont lancé en grande distribution des kit high-tech avec une lampe UV et des formules multi-composants, pour un séchage ultra rapide et surtout une tenue exceptionnelle du vernis. Ces produits sont appelés couramment "vernis gels" ou semi-permanents. Les marques pionnières sont Essence et Catrice en Allemagne (Groupe Cosnova) et Essie en France (Groupe L’Oréal).

La prochaine étape est sans nul doute l’imprimante pour ongles. Il suffira d’appliquer une base et l’imprimante déposera un motif présélectionné. Et c’est déjà possible à New York !

Jean Louis Mathiez, directeur de la société Cinqpats

Expert du packaging, Jean Louis Mathiez a occupé différentes fonctions au sein de grands groupes internationaux. Revlon dans les années 80, en tant que responsable du laboratoire de validation packaging, Bourjois et Chanel pendant 7 ans au sein de la division (Qualité et Étude de conditionnement), puis il rejoint l’Oréal en 1997 où il prend en charge le développement opérationnel des packagings de maquillage pour les marques Maybelline et l’Oréal Paris.
L’aventure se poursuivra chez Coty (ex- groupe Benckiser), où la place de l’innovation stratégique sera prépondérante.

De cette expérience naîtra la société Cinqpats. Au départ en exclusivité pour Coty, elle fonctionnera de manière autonome à partir de 2007.
Aujourd’hui Cinqpats travaille aussi bien pour les segments de l’ultra-luxe que pour la diffusion de masse, notamment en Allemagne.

Son produit le plus marquant

Le mascara stylo (Extrême Volume de Rimmel et Calligraphy de Astor) en 2000.
L’innovation, le premier mascara avec applicateur peigne en plastique combiné à un packaging en forme de stylo. Très gros succès avec plusieurs millions d’unités produites/mois.

Son plus grand flop

Tous les appareils électroniques d’application comme les mascaras vibrants, tournants, voir chauffants, qui ont eu un succès mitigé en sélectif et qui ont totalement échoué en mass-market.

Michelle Vincent

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