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mercredi 15 juin 2016Publications

Solaires : une publication scientifique en faveur des nanos

© L'Observatoire des Cosmétiques

Cette analyse, publiée dans le Medical Journal of Australia, est signée par le Dr. Paul Wright, de l’Université RMIT de Melbourne (Australie). Elle recense les risques et les bénéfices des nanomatériaux dans les produits solaires et la façon dont ils sont perçus par le public. Avec une conclusion claire : les bénéfices connus l’emportent sur les risques potentiels.

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~ 7 minutes

Extraits du texte de la publication

Les preuves disponibles indiquent que les produits solaires contenant des nanoparticules sont à la fois efficaces et sûrs d’emploi.

Les applications pour les nanomatériaux et les nanotechnologies se développent de façon exponentielle, parallèlement à la sensibilisation des gouvernements, de l’industrie et du public aux questions relatives à leur sécurité. Les inquiétudes du public augmentent également du fait des perceptions négatives très médiatisées selon lesquelles les produits nanos prolifèrent de façon incontrôlable et sont commercialisés sans que leur sécurité soit correctement évaluée.

Quels sont les risques potentiels ?

En réalité, il est impossible d’avoir une approche unique pour l’évaluation des risques potentiels et des bénéfices des nanotechnologies pour la santé humaine : elle serait à la fois impraticable et erronée. Il existe de nombreux types de nanomatériaux, et tous ne sont pas identiques ni ne comportent les mêmes dangers potentiels. Beaucoup de facteurs doivent être considérés pour l’évaluation des risques potentiels associés à un nanomatériau : la probabilité d’être exposé aux nanoparticules (d’une taille allant de 1 à 100 nanomètres, environ un millième de la circonférence d’un cheveu) qui peuvent provenir du nanomatériau ; l’éventualité d’une source d’exposition potentielle aux nanoparticules tout au long du cycle de vie du nanomatériau ; l’identification de qui ou de quoi peut être exposé ; ce qu’il advient des nanoparticules et la probabilité de la survenue d’effets biologiques néfastes émergeant de ces scénarii d’exposition.

Les propriétés toxiques intrinsèques des composés contenus dans les nanoparticules sont également importantes, de même que la taille de la particule, la forme, la charge de surface et les caractéristiques physicochimiques : cela influence fortement leur absorption par les cellules et le potentiel d’effets néfastes qui en découle. Les nanoparticules sont susceptibles d’avoir une plus grande toxicité si elles sont insolubles, pénètrent les membranes biologiques, sont persistantes dans le corps humain, ou (en cas d’exposition par inhalation) se présentent sous forme de longues fibres. Idéalement, le développement des nanomatériaux devrait inclure une approche basée sur la sécurité, puisqu’il y a une place sur le marché pour des produits nanos à l’impact réduit sur la santé et sur l’environnement.

Quels sont les bénéfices potentiels ?

Les nanotechnologies apportent de nombreuses perspectives de bénéfices pour la santé et pour l’environnement, dans le domaine des énergies renouvelables, de la purification de l’eau, des packagings alimentaires, de l’assainissement ou encore des processus de fabrication plus “verts”. On peut citer par exemple les ampoules basse-énergie ou les vêtements intelligents contenant des cristaux piézoélectriques nanos qui alimentent les appareils électroniques de celui qui les porte.

Le champ de la nano-médecine a également rapidement progressé avec des applications de délivrance ciblée des médicaments grâce aux liposomes (bien que beaucoup ne soient pas des nanoparticules au sens premier des définitions internationales, ils peuvent avoir une taille nano), des patches transdermiques, le développement d’implants biocompatibles ou les nanoparticules métalliques utilisées pour l’imagerie ou le traitement de plusieurs types de cancers. Les nanotechnologies servent aussi à développer des applications de diagnostic reliées à Internet.

Certains produits disponibles actuellement contiennent des nanoparticules d’argent pour leurs effets antimicrobiens, par exemple des vêtements qui requièrent ainsi des lavages moins fréquents. Le nano-argent est facile à incorporer à la surface de tels produits, mais leur qualité étant malheureusement variable, certains peuvent rapidement libérer des ions d’argent. Le nano-argent devrait plutôt être réservé pour des applications plus importantes, comme les vêtements dans le cadre du traitement d’infections résistantes qui entravent la cicatrisation des blessures.

La perception du risque et la balance bénéfices/risques

La perception par le public des risques potentiels des nanotechnologies est très différente selon les régions. En Asie, où elle est très positive, certains produits ont été commercialisés en tant que nano pour justifier un prix plus élevé. Des systèmes de certification, comme le “Nano-Mark” à Taïwan, sont même apparus pour vérifier les allégations marketing en relation avec les nanos.

À l’inverse, la perception négative des nanotechnologies dans d’autres régions du monde semble découler de décisions marketing discutables, comme la réduction des niveaux de nanoparticules d’oxyde de zinc en tant qu’actif dans les produits de protection solaire. Et ceci malgré le fait que leur utilisation dans les solaires a été évaluée sûre à plusieurs reprises par les autorités sanitaires partout dans le monde, et qu’elles ont été largement autorisées dans les produits solaires ou pour les lèvres.

Faire la balance des risques potentiels et des bénéfices de l’utilisation de produits solaires contenant des écrans anti-UV nanos est une question importante pour la santé publique en Australie, où le taux de cancers de la peau est le plus élevé au monde du fait d’une exposition excessive aux UV. Certains consommateurs hésitent à utiliser des solaires contenant des nanos, en dépit de leurs nombreux avantages par rapport aux filtres chimiques organiques conventionnels, qui peuvent provoquer des irritations de la peau et des allergies, doivent être réappliqués plus fréquemment et sont absorbés par la peau de façon plus importante (y compris ceux qui ont un potentiel de perturbation endocrinienne). Les nanoparticules d’oxyde de zinc sont particulièrement adaptées à une utilisation dans les produits solaires en tant qu’écran anti-UV physique à large spectre du fait de leur stabilité, de leur nature non irritante, de leur hypoallergénicité et de leur transparence optique. Elles ont aussi une plus grande capacité à contrer les UV que le matériau d’origine (dont les particules sont supérieures à 100 nm de diamètre).

Les inquiétudes au sujet des solaires nanos ont émergé en 2008 avec une étude montrant que les nanoparticules pouvaient décolorer la peinture des surfaces en acier. Il s’agit d’une exposition complètement différente de celle des personnes qui utilisent des solaires nanos, car dans ce cas, elles ont été formulées pour rester à la surface de la peau, qui élimine constamment sa couche la plus superficielle de cellules mortes (le stratum corneum). De nombreuses études ont montré que ces nanoparticules ne pénètrent pas facilement le stratum corneum de la peau humaine. Une d’entre elles, conduite en Australie, a utilisé des produits solaires contenant un isotope de zinc, stable et très peu répandu, ce qui a permis de le tracer précisément. Les chercheurs ont observé une très faible différence entre les nanoparticules et l’oxide de zinc original, en termes de niveaux d’absorption de zinc par le corps après plusieurs applications du produit sur la plage. Le niveau absorbé était également extrêmement faible par rapport aux niveaux de zinc (minéral essentiel dans la nutrition humaine) dont a besoin le corps humain, et le taux d’absorption par la peau était plus faible que celui des filtres UV chimiques les plus couramment utilisés.

L’autre écran minéral anti-UV est le dioxyde de titane. Deux formes cristallines distinctes ont été utilisées : la forme anatase photo-active et la forme rutile, moins photo-active, qui est préférable dans les formulations de produits solaires. Même si ces nanoparticules insolubles peuvent pénétrer plus profondément le stratum corneum que l’oxyde de zinc, elles sont aussi largement considérées comme sûres pour une utilisation dans les produits solaires, à l’exception de ceux proposés en sprays.

Les recherches sur leur effets directs sur la peau humaine et les cellules immunitaires ont montré que les produits solaires contenant des nanoparticules d’oxyde de zinc et de dioxyde de titane rutile sont aussi bien tolérés que les ions de zinc et les filtres chimiques organiques conventionnels. Il a aussi été montré que les cellules immunitaires humaines détérioraient les nanoparticules d’oxyde de zinc similaires à celles des produits solaires, ce qui indique qu’elles peuvent faire face à de telles particules. La cytotoxicité n’intervient qu’à des concentrations très importantes de nanoparticules d’oxyde de zinc, après l’absorption par les cellules et la dissolution intracellulaire. Et la modification de la surface des nanoparticules peut réduire l’absorption par les cellules et donc la cytotoxicité qui en découle.

Le débat actuel sur la sécurité des nanoparticules dans les produits de protection solaire inclut aussi le fait qu’elles peuvent potentiellement augmenter le niveau de radicaux libres dans la peau humaine au cours de la co-exposition avec les UV. Mais au contraire, il a été observé in vitro que les nanoparticules d’oxyde de zinc et de dioxyde de titane rutile réduisaient directement la quantité de radicaux libres nocifs dans les cellules immunitaires en co-exposition aux UVA, les rayons qui pénètrent le plus profondément.

De ce fait, les bénéfices connus l’emportent clairement sur les risques liés à l’utilisation des produits solaires nanos. Un message important doit être transmis au public : le danger d’une exposition excessive aux UV en termes de dommages causés à la peau et de cancer est bien plus grand que le risque perçu associé aux solaires nanos, qui n’est pas conforté par la littérature scientifique. Il est crucial que personne n’arrête d’utiliser les solaires à large spectre les plus efficaces pour se protéger du soleil.

Pour aller plus loin
• Voir le texte intégral de Potential risks and benefits of nanotechnology: perceptions of risk in sunscreens, The Medical Journal of Australia, Med J Aust 2016; 204 (10): 369-370.

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