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dimanche 1 avril 2018Actus produits

Quand la cosmétique croise la pharmacie

flacons de cosmétiques en dessous du sigle de la pharmacie

De la cosmétique à la pharmacie, il ne semble y avoir qu’un pas. Outre l’offre beauté qui fleurit dans les rayons des officines, on observe également une montée en puissance des produits de soins à l’expertise pharmaceutique. D’où vient cette tendance et pourquoi fonctionne-t-elle ? Décryptage.

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La dermocosmétique est née en France dans les années 60/70. À l’époque, le monde de la cosmétique est régi par les prêtresses américaines Elizabeth Arden et Helena Rubinstein.
Des hommes comme Jean-Charles Lissarague (fondateur du laboratoire Roc) ou Pierre Fabre, docteurs en pharmacie et travaillant pour l’industrie du médicament, décident de se pencher sur l’élaboration de produits de beauté. Jean-Claude le Joliff, fondateur de la Cosmétothèque, explique que parallèlement à cela, un événement va intensifier l’implication des pharmaciens en cosmétique : l’affaire du talc Mohrange.
“Cette société vendait des produits de toilette, notamment du talc formulé avec du parfum et un agent bactéricide, l’hexachlorophène, pour le rendre désinfectant.
En 1971, le laboratoire qui fabrique le talc se trompe dans les dosages d’hexachlorophène et en met plus que prévu. Il faut savoir qu’à cette époque, les process de fabrication ne sont pas bien établis, les mélanges ne sont pas très homogènes et les contrôles qualité sont a minima.
Il arrive sur le marché des boites de talc exagérément dosé avec ce bactéricide. Au final, 35 victimes seront à déplorer à cause d’un surdosage”
, raconte-t-il. À ce moment-là, la réglementation cosmétique est encore assez floue, mais ce drame de santé publique donne un coup d’accélérateur considérable.
Il est demandé aux autorités de la santé publique de travailler et d’éditer une réglementation cosmétique.
“Et qui sont les gens en charge de la santé publique dans les pays avancés ? Les pharmaciens.
Ils vont donc rentrer dans le jeu par le biais de la règlementation qui est publiée en France en 1975 et reprise dans sa quasi-intégralité en 1978 à l’échelle européenne. On va retrouver beaucoup de principes du monde pharmaceutique dans les règles qui encadrent les cosmétiques, comme la notion de Personne Responsable, de dossier de sécurité du produit ou encore d’eau dédiée à la fabrication des produits de beauté”
, relate Jean-Claude Le Joliff.

Pharmacie versus industrie : des cosmétiques vraiment distincts ?

Bien que l’appellation dermocosmétique soit rentrée dans le langage courant, y a-t-il une réelle différence entre un produit de beauté conventionnel et un soin formulé par des pharmaciens de profession ? Selon Jean-Claude Le Joliff, pas vraiment. “En tout premier lieu, il convient de rappeler qu’il n’existe pas de définition officielle de la dermocosmétique. D’ailleurs, Le Règlement Cosmétiques n’a jamais fait de distinction entre cette branche et la conventionnelle. Factuellement, il n’existe qu’une seule cosmétique.
Tout est question de choix et de positionnement plus que de réalité technique et scientifique.
Pour savoir si un produit est mieux qu’un autre, il faut regarder sa composition, c’est cela qui prime. Ce n’est pas meilleur, ce n’est pas moins bon, c’est juste créé par des personnes différentes”
, détaille-t-il.
Néanmoins, certains laboratoires de dermocosmétiques sont à l’origine de découvertes de molécules et de principes actifs qui ont fait avancer le monde de la beauté. Si les produits ne sont pas diamétralement opposés à ce que l’on peut trouver habituellement, qu’est ce qui explique la réussite de ce secteur ? Sans doute la place du pharmacien et la confiance que lui accorde le consommateur.

Le pharmacien, un gage de confiance

Le pharmacien occupe une place de choix dans le cœur des Français. Il est pour beaucoup l’assurance d’avoir des conseils avisés pour soigner sa peau et sa santé. Pierre Juhen, président de Patyka, partage également ces convictions.
La pharmacie est le canal de distribution privilégié de la marque. Le jeune entrepreneur explique ce choix par le souhait de “vouloir avant tout apporter un conseil de grande qualité à nos consommatrices. Or, le pharmacien est un professionnel de santé et un expert de la peau. Son conseil est très pertinent et légitime. Nos résultats en pharmacie sont excellents, à la fois grâce à la qualité de nos produits et grâce au titulaire et à son équipe de para, que nous plaçons au centre de notre stratégie et de notre attention par le biais de formations très régulières”.

La mode de la pharmacopée ancienne

L’autre raison pour laquelle Patyka est une marque proche des officines est qu’elle porte la pharmacie au cœur de son histoire et de son ADN. En effet, l’histoire de Patyka a commencé en 1922 avec un pharmacien, dont l’officine était située rue Rambuteau et qui réalisait des soins pour ses patientes sous forme de préparations magistrales. Une de ses formules a fait son succès, l’Huile Absolue, encore commercialisée aujourd’hui.
En 2002, l’officine est reprise, son titulaire découvre des articles de presse de l’époque sur l’Huile Absolue et décide de lancer une marque.
Elle est ensuite reprise en 2013. Pierre Juhen se dit ravi de développer “une marque dont l’histoire est belle et sincère. Patyka est une marque qui se distingue par la très grande qualité de ses soins, son expertise unique dans le bio, et notre amour de la pharmacie. D’ailleurs, Patyka vient du grec Apotheke qui signifie apothicaire, c’est-à-dire pharmacien !”. D’autres groupes cultivent un héritage historique et surfent sur la tendance des préparations anciennes remises au goût du jour : Mademoiselle Saint-Germain en est l’incarnation.
Charles Cracco, fondateur de la marque et docteur en pharmacie, raconte avoir eu l’idée de se lancer en cosmétique en “arrivant à Versailles. Imprégné du patrimoine de la ville, j’ai commencé à me passionner pour l’Histoire. De mon prisme de pharmacien, ce sont surtout les procédés cosmétiques et médicinaux qui me fascinaient. Un jour, en passant devant le Potager du Roi, je me suis demandé pourquoi ne pas recréer ces anciens cosmétiques en utilisant les plantes du Potager du Roi ? Cependant, la limite est, qu’aujourd’hui, le/la consommateur/trice n’a pas d’intérêt à utiliser la crème de Marie-Antoinette. J’ai alors vu l’opportunité pour Mademoiselle Saint Germain de transposer un mode de vie sain et respectueux de l’environnement au monde des cosmétiques : n’utiliser que des ingrédients français et locaux, dont les actifs viendraient du Potager, tout en s’inspirant des pharmacopées écrites par nos confrères il y a plusieurs siècles”.

Mais d’où lui vient cette attirance pour les soins d’antan ? “À l’époque, les recettes étaient très simples et ne contenaient généralement que quelques plantes mélangées à un corps gras. C’est ce que nous avons souhaité reproduire avec Mademoiselle Saint Germain.
Enfin, remettre au goût du jour d’anciennes pharmacopées permet de s’inspirer d’ingrédients qui ont prouvé plusieurs siècles d’efficacité et de tolérance (comme le romarin et le concombre), contrairement aux substances issues de la pétrochimie”, confie Charles Cracco. L’appellation dermocosmétique est finalement plus représentative d’un positionnement différent que d’un réel schisme avec la cosmétique conventionnelle.
En tout état de cause, elle séduit de plus en plus de consommateurs chaque année.
Jean-Claude le Joliff rappelle que la pharmacie n’a pas inventé la cosmétique. “La science de la beauté a toujours existé en marge de la science du médicament, être beau ou moche n’est pas une maladie”, conclut-il !
Mais c’est incontestablement un créneau qui, lui, se porte bien !

JS
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