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mardi 20 novembre 2018Congrès

Cosmétique minimaliste : quoi de neuf aux États-Unis et en Corée du Sud ?

Minimalisme

La tendance a beau être bien en place, elle ne cesse de se décliner. Le minimalisme cosmétique a plusieurs facettes et beaucoup d’entre elles viennent de l’autre côté du globe. Lors du troisième Formul’Tech organisé par le CED le 30 octobre 2018 à Lyon, Elina Tran, chef de projet chez Cosmetics Inspiration & Creation et Amélia Makoundou, chef de projet R&D et marketing chez Experis, ont fait un état des lieux des nouveaux aspects du less is more dans la beauté.

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~ 6 minutes

Technologie oblige, l’accès à l’information est quasi illimité, et ce n’est pas le consommateur qui va s’en plaindre.
De plus en plus éclairé, il décrypte désormais ce qu’il achète : “Plus question de se faire duper par les industriels !”.
Aujourd’hui, il a besoin de preuves et d’authenticité. Plus encore, il veut être assuré que les produits qu’il utilise sont bons pour lui, la santé et l’environnement.
On assiste ainsi à une perte de confiance à l’égard des entreprises de la beauté (et pas que…).
Ce climat de défiance voit donc naître l’émergence de petites marques indépendantes, à contre-courant des mastodontes cosmétiques, qui basent tout leur concept sur la transparence et montrent volontiers leurs process de fabrication.

Selon Amélia Makoundou, pour rassurer les consommateurs, l’industrie peut :
• adhérer à des certifications “vertes” et soucieuses de l’environnement,
• se tourner vers la biotechnologie,
• favoriser les ingrédients issus de la chimie verte, • substituer certains matériaux synthétiques par des solutions d’origines végétales, augmentant ainsi le taux de naturalité,
• faire des black-lists et bannir certains ingrédients controversés.

Le minimalisme et ses “modes”

Elina Tran et Amélia Makoundou ont présenté cinq tendances beauté américaines et sud-coréennes issues du minimalisme. Elles ont également mis en perspective les exigences formulatoires que ces modes impliquent.

Clean taste

Ce mouvement répond à la volonté d’avoir des formules plus saines. Il trouve sa source dans l’émergence des applications de décryptage de cosmétiques.
“De plus en plus de marques se positionnent sur des compositions ultra-saines et propres. Tata Harper, Gooth ou encore Youth to the People sont des enseignes qui incarnent à merveille cette tendance. Les grands distributeurs jouent le jeu également, comme Sephora qui a mis au point une charte”green”. En magasin ou sur Internet, on peut trouver un corner dédié aux produits de beauté clean”, a commenté Elina Tran.

En pratique
Pour aller vers des formules plus propres, pourquoi ne pas remplacer certains ingrédients synthétiques par alternatives plus naturelles ?
“On peut imaginer par exemple se passer de certaines silicones qui ont mauvaise presse par des huiles végétales qui permettent d’obtenir une très large palette de textures. Les consommateurs sont également très réticents vis-à-vis des PEG. Dans ce cas, la substitution par des polyglycérols qui offrent un toucher agréable et qui ont une bonne affinité avec la peau. Les gélifiants, eux, sont compliqués à évincer car, pour certains grades, il n’existe pas d’équivalents. Cependant, quelques fournisseurs d’ingrédients mettent au point des mélanges synergiques entre plusieurs familles de matières premières afin de proposer une alternative. Enfin, la problématique majeure reste les conservateurs. Pour s’en passer, certains formulateurs utilisent du propanediol, par exemple, pour son profil bactéricide qui aide à la conservation”, a expliqué Amélia Makoundou.

En résumé, la “clean beauty” n’est toujours pas évidente à appréhender pour les marques du fait de la complexité à trouver des équivalences naturelles.

Minimal Purity

Ce concept fait la part belle aux listes INCI courtes.
Des marques comme Thank Your Farmer ou The Ordinary prônent un retour à l’essentiel.
Tous les ingrédients ont un rôle à jouer. En revanche, les galéniques peuvent être un peu plus brutes que celles de la cosmétique conventionnelle.

En pratique
Pour aborder le minimalisme, le formateur peut explorer quelques pistes :
• élaborer des textures simples concentrées en actifs avec un très haut pourcentage de vitamine C ou d’AHA,
• utiliser des ingrédients multifonctionnels,
• formuler “sans” en suivant les guidelines de certains labels ou en élaborant sa propre black-list (ndlr : à partir du 1er juillet 2019, les mentions “Sans…” ou “Free-off…” seront plus que jamais à éviter, suite à l’entrée en application du Document Technique européen sur les allégations et de la nouvelle version de la Recommandation Produits Cosmétiques de l’ARPP).

Bien sûr, cette approche d’épuration a son lot d’inconvénients.
“Les soins aux listings d’ingrédients très courts ont un confort d’utilisation diminué au profit d’une efficacité revendiquée. À cela peut s’ajouter un coût de formule élevé pour les marques qui ne se servent que de matières premières actives. Enfin, le risque d’instabilité est présent. Certaines marques sont très fortes en communication mais parfois les produits déphasent et ne sont pas à la hauteur de leur promesse car leurs compositions comportent moins d’éléments fonctionnels essentiels à la solidité d’une formule”, a commenté Amélia Makoundou.

Sensitive Flesh

Selon Elina Tran, “c’est une véritable réaction à notre mode de vie urbain. Lumière bleue, stress oxydatif et autres polluants, l’épiderme est sans cesse agressé”.
Une vague de produits apaisants déferle en Corée du Sud et aux États-Unis.
On observe aussi un retour en force des pré/probiotiques ainsi que des soins promettant de rééquilibrer le pH de la peau.

En pratique
L’idée est de proposer des produits “ultra-doux”, moins décapants. Pour ce faire, les marques peuvent changer soit de famille de tensioactifs et utiliser des glutamates (dont le profil de tolérance est bon), soit en diminuer le pourcentage dans les formules afin de limiter leur potentiel irritant. “Réaliser des tests de sensibilité permet d’obtenir des claims comme hypoallergénique, testé sous contrôle dermatologique ou convient aux peaux sensibles”, a ajouté Amélia Makoundou. (ndlr: à nouveau, on ne peut qu’alerter sur la difficulté d’utiliser ce types d’allégations à partir du 1er juillet 2019, puisqu’elles entrent aussi dans le cadre des nouvelles dispositions concernant les allégations).

Healthy Glam

Le naturel devient plus sophistiqué, plus sexy.
Beaucoup de marques de niche se lancent et proposent des alternatives naturelles qui suivent les tendances.
Hors de question de se cantonner aux teintes “nude” dans le maquillage. Les couleurs sont vives, poussées. Les marques s’inspirent de la mode et montrent qu’elles n’ont rien à envier au conventionnel.

En pratique
“Les consommateurs veulent qu’on réponde à leurs attentes en changeant totalement la liste des ingrédients. Mais comment innover sans faire de compromis sur la qualité ?”, a interrogé Amélia Makoundou. “L’invention de nouvelles gestuelles est une piste à suivre. Si l’on part du principe que les consommateurs ne veulent plus de conservateurs, car ils sont controversés, on peut inventer des produits”sans” comme une poudre moussante qui ne contient pas d’eau non plus mais qui est composée de tensioactifs doux”, a-t-elle ajouté.

Pour s’inspirer, l’industrie cosmétique peut s’appuyer sur le secteur de la mode, véritable prescripteur de tendances et de couleurs.
Cependant, il faut avoir une bonne dose d’intuition pour flairer le courant à suivre.

Conscious Beauty

La planète va mal et les consommateurs de beauté attendent des marques qu’elles soient respectueuses de l’écosystème.
Protection de la cause animale, préservation des océans, sourcing naturel ou engagement solidaire, les industriels s’engagent et le font savoir. “Les petites enseignes sont de ferventes activistes, mais les groupes comme Unilever ou l’Oréal montrent qu’ils sont soucieux de l’environnement”, a affirmé Elina Tran.

En pratique
Encore une fois, Amélia Makoundou a rappelé que pour adopter une posture plus consciente, les acteurs de la beauté peuvent :
• opérer une sélection éthique des matières premières,
• adopter une approche vegan et exclure toutes les matières premières issues de l’exploitation animale,
• s’intéresser à la biodégradabilité des matières premières et des produits finis,
• s’engager solidairement en faveur de populations défavorisées.
“Cependant, certaines marques peuvent se heurter parfois à la confidentialité des process de fabrications de certains de leurs fournisseurs. Cela peut-être un frein à la transparence”, a nuancé Amélia Makoundou.

Ces tendances sont très populaires aux États-Unis et en Corée du Sud. Et on les voit déjà arriver dans l’Hexagone.
En conclusion, Amélia Makoundou a souligné que les consommateurs, de plus en plus exigeants, attendent de la transparence de la part de l’industrie, une vraie difficulté selon elle “car cela implique de dévoiler toutes ses cartes et de se rendre vulnérable d’un point de vue concurrentiel”.
Ils sont également très regardants sur la composition des produits et ne veulent aucun compromis sur le plaisir d’utilisation. Certes, les professionnels sont face à un grand challenge, mais la contrainte peut aussi être motivante et moteur de l’innovation !

JS
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