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mercredi 24 mai 2017Tendances

La cosmétique autrement ? Avec les influenceurs extérieurs...

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Lorsque l'on observe l'histoire de la cosmétique, il est assez facile d'identifier plusieurs périodes correspondant à des pratiques sensiblement différentes. Après les tout premiers temps puis l'industrialisation des formules et les apports de la biologie, de nouvelles notions viennent d'apparaître, marquées par l'importance de l'environnement et des influenceurs extérieurs sur l'état de la peau…

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Dans un premier temps, les produits ont souvent reposé sur des recettes plus ou moins miraculeuses, avant de devenir des formules industrielles. Les ingrédients étaient simples, la notion d’actifs n’existait pas ou ils étaient associés à des progrès scientifiques notoires, comme la découverte des vitamines. Au début du XXe siècle, les esthéticiennes et/où les grandes dames de la beauté étaient aux manettes. Ce sont souvent elles qui, sur la base de leurs connaissances de la physiologie cutanée souvent plus intuitives que fondées, ont donné les différentes orientations. Rappelons-nous que la notion de types de peau, encore actuellement très souvent à la base des routines de beauté, a été définie dans les années 1910 par Madame Rubinstein. On sait aujourd'hui que cette notion ne correspond pas à la réalité physiologique, mais elle continue d’être une notion qui fait référence.

Puis vint la période de l’apport de la biologie, c'est-à-dire l’époque où on a commencé à pouvoir d'une part évaluer l’activité de certaines molécules, puis, petit à petit, à préciser les mécanismes sous-tendant les principaux phénomènes de la physiologie cutanée, pour déboucher ensuite sur la mesure de l'efficacité de ces produits. Cette période commence dans les années 70 pour se poursuivre jusqu'à aujourd'hui. C'est là que la notion de principe actif a commencé à s'imposer. Souvent par analogie à la pharmacie, mais assez fondamentalement sur la base de connaissances qui se sont précisées petit à petit, sans pour autant suivre un schéma thérapeutique. En effet, il n'est pas question de traiter les pathologies, mais d'accompagner un organe qui à ses caractéristiques bien précises. Cet apport de la biologie sera déterminant et va progressivement devenir un mode de la pensée unique. De très nombreuses spécialités ont alors été proposées sur la base des mécanismes biologiques internes à la peau, proposant de réguler ses fonctions, son homéostasie et, plus généralement, le vieillissement, comme si la biologie de la peau était la même quelque soit le patrimoine génétique et/ou les conditions dans lesquelles vit la peau. Des quantités astronomiques d'inhibiteurs d'enzymes, d'activateurs biologiques de toutes sortes, de boosters d'énergie, d'effecteurs divers et variés, de molécules fonctionnelles, de peptides, tous d'origines diverses (biologiques, végétales ou de synthèse) ont alors été proposées et déversées sur le marché. À date, il existe encore de très nombreuses spécialités commerciales, pour ne pas dire toutes, fonctionnant sur ce mode.

Depuis quelque temps, on commence toutefois à voir apparaître des notions sensiblement différentes. Si l'on avait bien vu lors du développement des techniques d'évaluation reposant sur la biophysique que les conditions d'environnement jouent un rôle essentiel et constituent un déterminant important pour la peau, cette notion d’impact environnemental a souvent été négligée. Une tendance assez nette se dessine actuellement autour de l’idée que ces éléments doivent être mieux pris en considération.

Le photo-aging a été le premier processus associé au vieillissement qui a été clairement rattaché aux conditions environnementales. La meilleure façon d’interférer avec ce processus est d’ailleurs tout simplement de filtrer les radiations responsables, plus que d’activer tel ou tel mécanisme biologique. La recherche de protection contre la lumière bleue ou les infrarouges, concepts très actuels, ne fait que poursuivre sur ce mode.

Plusieurs équipes ont proposées des avancées sur l’effet de ces mécanismes comme cette publication : Olay data shows skin care matters more the DNA . Dans ce travail, l'équipe de recherche montre que les conditions environnementales jouent un rôle absolument déterminant sur les caractéristiques de la peau. Les équipes des Laboratoires Clarins lors des dernières Journées Européennes de Dermocosmétologie ont présenté un travail s’intitulant : Impacts des changements climatiques courts et répétés sur la différenciation et le remodelage matriciel d’un modèle humain de peau reconstruite.

Dans une démarche sensiblement différente, Bérengère Fromy développe au CNRS depuis 2002 des travaux sur le couplage "mécano-sensibilité et vasodilatation cutanée". Elle cherche à comprendre les mécanismes de défense de la peau pour lutter efficacement contre les contraintes mécaniques. Le domaine cosmétique s’intéresse à ces travaux et à la capacité à évaluer la qualité fonctionnelle de la peau. Par ailleurs, elle investigue sur l’influence des propriétés viscoélastiques cutanées sur les capacités d’ajustement micro-vasculaires face aux contraintes mécaniques. Les modifications de ces propriétés rhéologiques au cours du vieillissement et lors de pathologies comme le diabète ouvrent des perspectives très porteuses.

Plus pratiquement, les étudiants du Master de Cosmétologie de Châtenay-Malabry 2017 achèvent, comme chaque année, leurs études par la présentation de concepts et de gammes de produits qu'ils ont conçus dans le cadre de leur enseignement. Avec la marque "Seisoen", un groupe propose aux femmes de 25 à 45 ans d'adapter leur routine de soins aux saisons. Pour cela, quatre produits reprenant des thèmes marketing originaux formulés autour d'actifs spécifiques, mais courants, permettent de répondre à ce positionnement ( Source : Expression Cosmétique 44 – Mars/Avril 2017- 48-49 ).

Il commence à exister des marques prenant le thème de la cosmétique climatique comme axe de positionnement majeur.

Microbiome et pollution, bien que plus éloignés de ces idées, sont tout de même à rapprocher de ce concept "d’influenceurs extérieurs".

L’innovation technologique viendra probablement au secours de cette idée. En effet, les objets connectés (IoT) permettent de faire maintenant des choses remarquables. C’est ainsi que le capteur Wayskin , un accessoire simple, permet d’obtenir des conseils personnalisés en fonction des spécificités de la peau mais surtout aussi de l’environnement de l’utilisatrice. L’appareil est doté de capteurs spécifiques pour la peau ainsi qu’un capteur d’humidité et un détecteur de rayons UV. La combinaison de l’analyse de la peau avec la prise en compte des facteurs environnementaux permet ainsi d’obtenir un diagnostic complet.

Quelques applications vont déjà dans ce sens : Ioma avec l’indice d’UV ou Romy, bien que ce ne soit pas très clair. Dans la même idée, vous aurez remarqué le MiLi Moisture Meter de H2O Beauty qui vient d’être proposé. Ce minuscule "device", donné en cadeau pour l’achat de produits de la marque, permet à l’utilisateur de mesurer lui-même et en temps réel le taux d’hydratation de sa peau, et d’ajuster la proposition cosmétique en conséquence.

Voilà quelques éléments qui devraient nous alerter sur cette idée qu’il y a bien une "cosmétique environnementale" à coté de cette "cosmétique biologique" qui s’accapare toutes les attentions depuis plusieurs décennies maintenant. Cette "cosmétique environnementale" ne serait-elle pas le vrai moyen de la personnalisation ? Car, qu’est ce qui bouge le plus, la biologie de la peau ou son environnement ? Va-t-on encore longtemps proposer la même crème avec le même actif au même dosage pour tout le monde all over the world ? La "cosmétique instrumentale" va également dans le même sens, car on sait maintenant que des "influenceurs extérieurs" comme la lumière, le froid, la mécanique, etc. sont aussi intéressants que des "actifs". Voir à ce propos cette série de la Cosmétothèque sur les beauty toys.

La recherche de nouvelles substances ayant des propriétés isolantes, équilibrantes, protectrices contre le vent, le froid, la pollution, les radiofréquences, etc., sans passer nécessairement par la biologie, ouvrirait une nouvelle époque, tout aussi passionnante. Ce qui se passe autour du microbiome va dans ce sens, celui malgré tout de regarder les choses autrement.

Est-ce vraiment une cosmétique autrement ? Fondamentalement non : le centre de la question reste la peau. Ceux qui ont suivi ces questions dans le détail savent que, finalement, ces différents concepts ne sont que complémentaires et souvent imbriqués les uns dans les autres. Mais du point de vue des positionnements et du storytelling, question centrale de tous ceux qui sont concernés par le développement de produits, ce serait un nouveau paradigme.

Je m’étais permis de le signaler il y a quelques temps déjà, sans être trop écouté, dans deux billets, Vers une cosmétique environnementale ? , et La beauté connectée, suite ! … mais ce n’est pas la question.
Mais bon, il n’est jamais trop tard pour bien faire !!!!!!

Jean-Claude Le Joliff

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