Continent iconique de la beauté, l’Asie est bien souvent à la pointe en matière d’innovations cosmétiques. À l’occasion d’un événement organisé par le CEW France le 24 septembre à Paris, Florence Bernardin, fondatrice du cabinet Informations Inspirations, a mis en lumière cinq tendances cosmétiques majeures du marché asiatique.
Suite de l’article Décryptage du marché asiatique
S’il y a bien une zone du monde que l’on doit regarder en termes d’inspiration beauté, c’est l’Asie, selon Florence Bernardin. Corée, Japon, Chine, Indonésie ou Malaisie : ces pays ont un temps d’avance. “Que l’on veuille s’inspirer ou que l’on souhaite développer sa marque dans l’une de ces zones, il est important de savoir ce que le marché consomme”, explique-t-elle.
Pas assez d’heures dans une journée
La première tendance présentée par Florence Bernardin reprend cette idée que les Asiatiques manquent cruellement de temps et ont une vie professionnelle intense.
De ce fait, les consommateurs sont en attente de solutions pour simplifier leur quotidien, comme des services de livraison hyper efficaces ou des restaurants équipés de bornes de recharge pour ne jamais tomber en panne de batterie. La Chine travaille même à un système de reconnaissance faciale dans le métro pour éviter aux usagers de valider leur titre de transport.
“On voit émerger en Chine, dans les centres commerciaux, des petites cabines que l’on peut réserver via smartphone. Dedans, on est seul, avec des échantillons de produits à disposition pour pouvoir se rafraîchir et se maquiller sans avoir à repasser chez soi. On observe aussi beaucoup de concepts de ‘couplage de service’, comme la banque qui fait restaurant, ou encore le lavomatic-espace de co-working”, ajoute Florence Bernardin. Nous sommes face à une société en pleine mutation, très exigeante.
En résumé, elle veut du pratique, du rapide sans compromis sur la qualité de ce qu’elle consomme.
Illustration en cosmétique
Dans la beauté, cette tendance se traduit par l’explosion de produit “on the go”, très concentrés et transportables. Le conditionnement en ampoule est largement plébiscité.
“La technologie n’étant jamais loin, on voit apparaître pléthore de devices qui massent le visage ou aident à la pénétration des actifs par ionisation”, détaille l’experte. “Les Asiatiques sont friandes de tous les produits qui peuvent leur faire gagner du temps, comme les masques que l’on peut se faire en faisant du sport ou en prenant sa douche. Certains ont été conçus avec une aération pour la bouche afin de pouvoir prendre son petit-déjeuner et se brosser les dents. Sur le même modèle, on peut également citer le tampon à sourcils, permettant de se maquiller rapidement”.
Enfin, pour répondre aux besoins de ceux qui aiment voyager, on trouve de plus en plus de produits nomades, conditionnés en sachets et qui permettent d’avoir la bonne dose sans avoir à gaspiller.
“Certes, ce n’est pas très écoresponsable, mais le consommateur veut par dessus tout des produits qui s’adaptent à son mode de vie”.
Se reconnecter avec la nature
Aujourd’hui, se rapprocher des éléments fait sens pour beaucoup de consommateurs asiatiques.
Leur santé est primordiale et beaucoup d’entre eux s’adonnent volontiers à des retraites spirituelles dans des temples ou quittent les villes afin de s’installer à la campagne.
Certains magasins se sont emparés de la tendance et proposent des animations en ce sens.
“On peut citer Eleven, l’un des ’malls’ les plus connus de Shanghai qui a dédié son dernier étage à de ’l‘open farming’. On peut y planter des légumes ou des plantes, parfois on y trouve des cochons, des vaches. Il y a également beaucoup d’événements autour de ce qui a été récolté”, illustre-t-elle. “Les médecines traditionnelles reviennent également sur le devant de la scène et beaucoup de marques se targuent d’utiliser des herbes ou des ingrédients de la pharmacopée asiatique”.
Illustration en cosmétique
Sus aux super-food ! Pour être en forme, on nourrit sa peau comme on nourrit son corps. La cosmétique s’enrichit de betterave, de ginseng, fruits rouges et autres baies.
De la même manière que pour l’alimentaire, les consommateurs veulent des produits de première fraîcheur. “En magasin, les vendeuses vous montrent toujours la date de fabrication du produit. On voit aussi l’émergence de corners où l’on fait les produits à la demande”.
Se reconnecter à la nature induit le fait d’être soucieux de l’état de la planète. Ainsi, les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux labels vegan et cruelty free.
Cette tendance voit également exploser la présence d’ingrédients fermentés dans les produits de beauté.
Enfin, “on est aussi à l’écoute de son corps et de son rythme, comme le montre la cosmétique ’ menstruelle’. On assiste à une montée en flèche de produits adaptés à l’état de la peau en fonction de la période du cycle. Contrairement à la France, les règles ne sont absolument pas taboues en Asie”, indique Florence Bernardin.
Stay long, live young !
Bien que les marchés asiatiques soient jeunes, ils sont tout de même vieillissants, personne n’y échappe.
Aujourd’hui, l’Asie se demande comment bien vieillir avec toute la pression sociale, comment se libérer des carcans des diktats sociaux ?
Les consommateurs sont stressés, ont des rythmes harassants et leur hygiène de vie participe aussi au vieillissement.
Illustration en cosmétique
Mort à la pollution digitale et lumineuse ! Les Chinois ont été les premiers à investir la cosmétique anti-lumière bleue.
“Aujourd’hui, il existe même des faux cils qui luttent contre les UV et qui protègent la cornée. On voit aussi poindre beaucoup de produits à base de probiotiques et prébiotiques pour renforcer les défenses immunitaires”, ajoute Florence Bernardin. “Mais le vieillissement est aussi provoqué par la chaleur. Alors qu’en Europe on accueille l’été avec joie, les Asiatiques en ressortent épuisés et physiquement éprouvés. Ainsi, l’industrie cosmétique se doit de répondre à ces problématiques en proposant, par exemple, des shampooings rafraîchissants pour les femmes portant le hijab et dont le cuir chevelu souffre doublement. Le stress est également mauvais pour la jeunesse du corps, alors certaines marques se lancent dans des déodorants relaxants ou encore dans des cosmétiques favorisant le sommeil”.
Les makers et les dreamers
Cette tendance est initiée par la mode des réseaux sociaux, des filtres make-up et des selfies.
Les consommatrices cherchent à se maquiller comme leurs héroïnes virtuelles préférées.
La digitalisation permet aussi de casser les codes, de plus en plus d’hommes s’affichent en portant du maquillage.
Enfin, c’est l’ère de l’expérience. Finies les publicités qui vantent les bénéfices d’une crème ou d’un sérum. “On se doute bien qu’un shampooing lave les cheveux. Aujourd’hui, les marques axent leurs communications sur le plaisir d’utilisation qu’on en retire”, explique Florence Bernardin.
Illustration en cosmétique
Sans surprise, l’Asie recèle de produits “instagrammables”, aux couleurs incroyables. On trouve aussi des gammes de cosmétiques qui se différencient non plus par leurs bénéfices, mais par leurs parfums.
Le retour du minimalisme
À l’instar de l’auteur du livre “Vivre avec 200 chose”, Fumio Sasaki, beaucoup de Japonais prônent un retour au minimalisme et à l’essentiel. “On peut citer la marque de décoration Muji qui ouvre des hôtels afin de faire apprécier aux consommateurs leur univers épuré”, ajoute l’experte en tendances. “Le minimalisme en Asie va plus loin. Les Coréennes, par exemple, sont victimes d’un véritable diktat de la beauté. De plus en plus de femmes affichent des “bare faces“ et se dévoilent face caméra, sans maquillage. Cette mode rime aussi avec le “skip face” où comment limiter sa consommation de cosmétiques. Quand on sait que les Asiatiques peuvent s’appliquer jusqu’à 30 produits différents par jour, certaines consommatrices essayent de réduire leur routine”.
Illustration en cosmétique
Rien d’étonnant à voir émerger des produits aux Incis courtes, qui revendiquent la présence de peu d’ingrédients. Les allégations “cica”, synonyme de protection contre les inflammations, sont également de la partie.
Précurseurs dans bien des domaines, les Asiatiques sont souvent prescripteurs en termes de beauté. Certaines de ces tendances commencent déjà à pointer le bout de leurs nez en Europe, et dans le reste du monde.