Le silicium, élément très abondant à la surface de la Terre, utilisé très largement en cosmétique par l'intermédiaire de différents dérivés, l’est également comme principe actif depuis de nombreuses années. La confusion est souvent faite entre les dérivés organiques du silicium et les polymères du silicium. Cet article permet de préciser le rôle de dérivés spécifiques, les silanols, et leur rôle en tant qu'actif. Merci aux contributeurs.
Les premières études sur le rôle du silicium portaient sur l’alimentation animale. Elles ont fait apparaître qu'il constituait un élément indispensable à leur développement: par exemple, des poulets nourris avec des aliments appauvris en silicium présentaient une croissance très ralentie. Malgré les difficultés à doser le silicium dans les années 1970, cet élément a été rapidement mis en évidence et dosé dans les mucopolysaccharides puis dans les divers tissus par plusieurs chercheurs américains et français : Schwartz[1], Loeper[2], Carlisle[3], Charnot.
Des études sur l’aorte ont montré une étroite corrélation entre désorganisation des tissus et diminution de la teneur en silicium. Celui-ci semblait étroitement lié à des glycoprotéines et paraissait intervenir sur l’organisation des matrices extracellulaires. La première idée qui a surgi immédiatement a été d’essayer de voir si un apport en silicium pouvait permettre une modification de cet état.
La difficulté a été de développer un produit contenant du silicium qui soit stable et surtout qui ne polymérise pas. Il s’agissait donc d’une approche chimique totalement à l’opposé de la chimie des silicones.
En fait, la chimie du carbone n’étant pas très éloignée de celle du silicium, et le silanol étant au silicium ce que l’alcool est au carbone, c’est sur le silanol qu’a porté l’essentiel des travaux.
Ce qu’il fallait, c’était de s’assurer de la stabilité à long terme de ces silanols (éviter qu’ils ne polymérisent) et suivre leur capacité d’assimilation par les tissus.
Une série de brevets a ainsi été déposée depuis les années 1970, tout d’abord dans le domaine pharmaceutique, puis plus spécifiquement en cosmétique, par la société Exsymol. Ces brevets portaient sur les techniques de synthèse et sur les propriétés biologiques mises en évidence après utilisation de cette famille des silanols. Le silanol est ainsi devenu à la fois une entité moléculaire et une véritable technologie.
Pour assurer la stabilité des silanols, il a fallu coupler l’entité moléculaire méthylsilanetriol à une structure possédant des fonctions hydroxyles ou carboxyliques disponibles. La première molécule à visée pharmaceutique a été développée au début des années 1970 à partir de l’acide salicylique en liaison avec un laboratoire spécialisé en ophtalmologie, sous le nom de Dulciphak. Ce collyre est toujours commercialisé.
Le premier silanol à visée cosmétique a été développé lui aussi dans les années 70. La molécule stabilisatrice devait, outre avoir la structure chimique requise, disposer d’un potentiel d’activité cosmétique lui-même reconnu, et si possible d’une image valorisante pour le marché. C’est ainsi que l’acide alginique, extrait des algues de type laminaires, a été retenu.
Une sélection des divers acides alginiques proposés sur le marché a conduit à standardiser la molécule stabilisatrice du silanol en procédant à une dépolymérisation partielle de cet acide polymannuronique.
Ainsi est né Algisium.
Le groupe L’Oréal a été l’un des premiers utilisateurs de ce silanol à la fin des années 70. Cet ingrédient est encore présent, plus de 40 ans après, dans les produits de soin de nombreuses marques cosmétiques.
Les premières études menées par Exsymol, tout d’abord sur cultures de cellules, dans les années 80, ont mis en évidence l’intérêt d’un apport en silicium dans la multiplication des fibroblastes en milieu appauvri : on retrouvait les caractéristiques d’une culture en milieu optimal.
Des études suivantes ont fait apparaître que le silicium améliorait l’organisation des membranes cellulaires. Leurs paramètres d’ordre étaient améliorés. On pouvait donc espérer ainsi une meilleure résistance des cellules à des attaques de type radicalaire. Ces études ont été complétées par le rôle du silicium dans les communications intercellulaires.
Les multiples recherches suivantes ont été réalisées, sur épiderme reconstruit, puis sur des modèles 3D plus sophistiqués, lattices et explants humains. La corrélation étroite qui existait entre qualité des tissus et teneur en silicium orientait bien évidemment vers la restructuration des tissus et plus généralement vers le ralentissement de leur vieillissement.
Ces recherches menées sur l’activité biologique des silanols, parallèlement à des études de biodisponibilité et à tous les tests toxicologiques exigés, ont permis l’exploitation de ces nouvelles molécules, d’autant plus que la cosmétique prenait dans les années 80 un virage significatif en n’étant plus seulement une cosmétique décorative. À cette époque apparaissaient ainsi les premières notions de "traitement préventif".
Des centaines de tonnes de silanols se retrouvent ainsi dans la plupart des produits des grandes marques cosmétiques internationales. D’autres molécules spécifiques de la même famille ont été mises au point et orientées quant à elles vers le domaine strictement médical, la rhumatologie et l’ophtalmologie.
Références
[1] Schwarz K., Proc. Nat. Acad. Sci. USA, Vol. 70, No. 5, pp. 1608-1612, 1973.
A Bound Form of Silicon in Glycosaminoglycans and Polyuronides
.
[2] Loeper J., Loeper J., Lemaire A., La Presse Médicale, 74, No. 17, pp 865-868, 1966.
Étude du silicium en biologie animale et au cours de l'athérome
.
[3] Carlisle M., Federation Proceedings, Vol. 33, No. 6, 1974,
Silicon as an essential element
.
[4] Charnot Y., Pérès G., Séance du 4 novembre 1970 de la Société d'Endocrinologie, pp 397-402.
Contribution à l'étude de la régulation endocrinienne du métabolisme silicique
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Nous devons cette contribution à André Franco André est diplômé Ingénieur chimiste de l’École supérieure de Chimie Industrielle de Lyon en 1973. Il intègre la société Exsymol à Monaco en 1976, participe à sa création puis à son développement, en tant que Directeur Technique, puis Directeur Général, jusqu’en 2012. Il est co-auteur de nombreux brevets, en particulier sur les nanoparticules et les dérivés du silicium pour utilisation en pharmacie et en cosmétique. |
La gamme actuelle des silanols
Par Christophe Paillet, Directeur Communication et Relations clients
La versatilité de la technologie silanol a permis de mettre au point une gamme de spécialités caractérisées par leur teneur en silicium et par la présence d'une substance sélectionnée pour son intérêt cutané, et conférant l'individualité propre à chaque silanol. C'est ainsi que plus de trente références associant silicium et aminoacides, vitamines, acides uroniques, etc., composent le catalogue des silanols contemporains. On peut citer parmi ces spécialités Algisium, Caféisilane, D.S.H., Hydroxyprolisilane, etc. (Voir l'ensemble des spécialités dans le tableau ci-dessous).
Tous les silanols présentent les propriétés caractéristiques du silicium organique relatées précédemment, et les substances associées confèrent une spécificité permettant de sélectionner tel ou tel silanol selon l'effet spécifique recherché. C'est ainsi qu'on favorise Caféisilane (silanol à base de caféine) pour une application anticellulite et raffermissante, ou D.S.H. (silanol à base d'acide hyaluronique) pour une application hydratante, ou Hydroxyprolisilane (silanol à base d'hydroxyproline) pour un effet raffermissant puissant, ou encore Algisium ("silanol vedette" à base d'acide alginique) pour un effet multiple…
Les silanols sont, en général, hydrosolubles, mais certains procédés de préparation spécifique permettent de proposer des versions liposolubles, ou même solides.
Un petit survol des réseaux de distribution (sélectifs, GMS, salons d'esthétique, Internet, vente directe…), mais aussi des bases de données disponibles en ligne, permet de se rendre compte de l'utilisation exhaustive des silanols dans un très grand nombre de produits, et ce depuis leur création.
ACTIF |
INCI Name |
Fonction Cosmétique |
ALGISIUM C |
Methyle silanol mannuronate |
Multi activité - restructuration cutanée |
ARGISIL C |
Silanetriol Arginate |
Activation lipolyse par les cytokines |
ASCORBOSILAN C |
Ascorbyle methylsilanol pectinate |
Potentialise la Vitamine C (antiradicalaire) |
CAFEISILANE C |
Silanetriol Alginate and Caffeine |
Potentialise la caféine (amincissant, raffermissant) |
CAPILLISIL HAUTE CONC |
Silanediol salicylate |
Antichute cheveux |
D.S.H.C N |
Dimethylsilanol Hyaluronate |
Hydratant |
EPIDERMOSYL |
Hyaluronic acid and silanetriol |
Filler like : booste le renouvellement épidermique |
G.P.S. |
Silanetriol trehalose ether |
Osmorégulateur |
HYDROXYPROLISILANE C N |
Méthylsilanol hydroxyproline aspartate |
Raffermissant (rides, vergetures, corps) |
LASILIUM |
Sodium lacate methylsilanol |
Potentialise l'acide lactique |
LIPOSILIOL C |
Dioleyl tocopheryl methylsilanol and oleyl alcohol |
Version lipophile du silanol |
MS HC |
Silanetriol and hydrolyzed collagen |
Version solide du silanol |
PHYKOSIL 2000 |
Asparagopsis arnata extract |
Version naturelle du silanol |
PRO DSB |
Dimethyl oxobenzo dioxasilane |
Précurseur des silanols pour applications spécifiques |
SILHYDRATE C |
Copper PCA Méthylsilanol and Sodium PCA |
Hydratant |
SILPEARL |
Hydrolyzed pearl and silantriol |
Version "luxe" (perle) du silanol |
SILYSIN C4 |
Silantriol lysinate |
Potentialisation de la lysine - antyglycant |
SIRHAMNOSE |
Silantriol Rhamnose |
Effet antiâge via le JDE |
THEOPHYLLISILANE C |
Methylsilanol carboxymethyl theophylline alginate |
Potentialisation bases xanthiques - amincissant |
TYROSILANE |
Methylsilanol acetyltyrosine |
Activateur de bronzage |
Nous remercions la société Exsymol pour cette contribution.
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