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jeudi 15 juillet 2021Ingrédients

Le dioxyde de titane - Titanium dioxide

© CosmeticOBS-L'Observatoire des Cosmétiques

Il participe de nombreuses formules cosmétiques, principalement en tant qu’écran solaire ou colorant. Il est aussi de toutes les polémiques quant à sa toxicité, surtout quand il intervient sous forme de nanoparticules. Le dioxyde de titane, Titanium dioxide pour la nomenclature INCI, TiO2 pour les intimes, est un ingrédient qui ne cesse de faire l’actualité.

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La cosmétique n’a pas l’apanage de l’utilisation du dioxyde de titane. Cette poudre d’origine minérale, composée d’oxygène et de titane et purifiée en laboratoire, est aussi utilisée dans les peintures, laques, encres d’imprimerie, matières plastiques, caoutchoucs, fibres synthétiques, papiers, émaux, céramiques, matériaux de construction, cuirs, produits pharmaceutiques, denrées alimentaires…

Titane, tri-tâches

Facilement soluble dans l’huile ou tout autre corps gras comme les glycérides (graisses et huiles), le dioxyde de titane connaît trois applications majeures en cosmétique, que lui reconnaît la nomenclature officielle des ingrédients.

Opacifiant, agent de charge

Sa poudre, comme tant d’autres, peut être utilisée pour donner de la consistance aux produits cosmétiques par exemple dans les poudres de maquillage, ou pour ajuster la transparence ou la consistance de la texture d’une crème.
Sous cette forme, il apparaît dans les listes d’ingrédients sous l’appellation : Titanium dioxide.
Mais cette utilisation reste marginale, comparée aux deux autres.

Colorant

Le dioxyde de titane est un pigment blanc très intense. Il peut à ce titre être mis en œuvre dans les crèmes ou laits de soin, dans les produits d’hygiène comme les dentifrices, et, bien sûr, dans tous les types de produits de maquillage.
Dans ce cas, son fort pouvoir couvrant se double d’un effet d’optique très utile dans les produits anti-âge : ses paillettes, qui s’orientent parallèlement à la surface de la peau lors de l’application, ont tendance en effet à s’accumuler de préférence dans le relief cutané, reproduisant la continuité épidermique et donnant l’impression que les rides sont estompées.
Sous cette forme, il apparaît dans les listes d’ingrédients sous l’appellation : CI 77891.

Écran anti-UV

Formant une barrière physique stable contre les rayons UV, le dioxyde de titane est employé enfin pour sa capacité à réfléchir les rayons UVB et dans une moindre mesure les rayons UVA. C’est alors logiquement dans les produits de protection solaire qu’on le retrouve principalement, mais aussi dans les crèmes de soins avec FPS ou les BB crèmes.
Sous cette forme, il apparaît dans les listes d’ingrédients sous l’appellation : Titanium dioxide.

D’abord utilisé, et notamment par la cosmétique naturelle et bio qui y trouvait une alternative efficace aux filtres synthétiques, sous forme micronisée (une poudre réduite très finement), il avait le désavantage de former, comme l’oxyde de zinc auquel il est généralement associé, un film blanc inesthétique sur la peau. Pour y remédier, la cosmétique a réduit encore plus finement les particules de dioxyde de titane, jusqu’à une taille inférieure à 100 nanomètres, faisant entrer cet ingrédient dans le champ des nanomatériaux.

Titane, sans taches ?

Longtemps présenté comme tout à fait sûr d’emploi, stable en tant que colorant, alternative naturelle aux filtres anti-UV synthétiques suspectés d’effets secondaires toxiques (perturbation endocrinienne, allergie, nocivité pour les coraux marins…), le dioxyde de titane a vu son innocuité remise en cause à deux niveaux.

Poudre cancérogène ?

C’est d’abord le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) qui l’a classé dans la catégorie 2B des substances susceptibles d’être cancérogènes pour l’homme, des études ayant montré que des concentrations élevées de ce minéral pouvaient causer des cancers du poumon chez l’animal, suivant des processus qu’on observe également chez des hommes travaillant dans des milieux où il est présent à forte concentration sous forme de poussières.

À noter cependant que le risque n’existe que par inhalation de grandes quantités de poudre de dioxyde de titane, particulièrement dans le milieu du travail, et donc pas sous la texture ni dans les concentrations utilisées dans les cosmétiques, à l’exception peut-être de ceux présentés en aérosols.

Nano toxique ?

La deuxième alerte, qui, elle, concerne au premier chef l’utilisation de cette substance dans les produits solaires, vient de son utilisation sous forme de nanoparticules.
Le débat autour de l’éventuelle toxicité des nanomatériaux est loin d’être clos.

Des études préliminaires ont montré que ces nanoparticules pourraient s’avérer toxiques pour l’organisme, notamment en produisant des radicaux libres et en endommageant l’ADN des cellules cutanées.
Elles seraient dotées d’autre part d’un potentiel de pénétration transdermique important, dès que leur taille est inférieure à 100 nanomètres, ce qui est contesté par certaines études.
Certaines recherches ciblent encore leurs potentiels effets délétères sur le cerveau, leur capacité à former des oxydants nocifs pour la peau sous l’effet de la lumière du soleil ou encore leurs effets néfastes pour l’environnement et notamment pour les milieux aquatiques.
Dans une évaluation datant de 2001, l’Afssaps (aujourd’hui ANSM) concluait à l’existence d’un risque qui ne pouvait pas être exclu.

La loi du titane

Face aux inquiétudes et doutes récurrents, les autorités européennes en charge d’élaborer la réglementation cosmétique se sont saisies du dossier. D’abord en créant un régime spécial pour tous les nano-ingrédients, puis en ciblant spécifiquement son attention sur (entre autres nanos), le dioxyde de titane.

Les nanos sous surveillance

Depuis l’entrée en vigueur du nouveau Règlement Cosmétiques le 11 juillet 2013, tous les nano-ingrédients doivent être clairement indiqués dans la liste des ingrédients qui figure obligatoirement sur les étiquettes des cosmétiques. Ils doivent y apparaître suivis de la mention [nano]. Une disposition instaurée dans un souci de transparence envers le consommateur, qui est libre, une fois ainsi informé, de choisir ou pas d’utiliser un cosmétique contenant des nanos.

Autre nouveauté instaurée par le Règlement : tous les ingrédients sous forme nanoparticulaire doivent être notifiés, six mois avant la mise sur le marché des produits qui les contiennent, à la Commission européenne. À charge pour celle-ci d’estimer dans ce délai si le produit est conforme aux exigences de sécurité en la matière.
Pour ce faire, le Comité d’experts scientifiques européen (CSSC) étudie le dossier de l’évaluation de la sécurité que doit fournir le fabricant de cosmétiques, selon des règles précises édictées par ces mêmes experts.

Ce principe, très similaire à celui d’une autorisation préalable de mise sur le marché, a tout pour rassurer sur la sécurité des nanos. Il se heurte toutefois à quelques difficultés techniques.
C’est qu’il est toujours difficile aujourd’hui de caractériser avec précision un nanomatériau ou d’évaluer avec certitude le résultat du phénomène d’agglomération des particules, qui peuvent transformer une poudre à l’origine nano en composé non-nano dans la formule du produit fini… Et il est bien délicat d’évaluer la sécurité d’un ingrédient si on ne sait pas avec certitude s’il doit être considéré, ou pas, comme un nano.

Le processus d’autorisation du nano-TiO2

Notifier tous les nano-ingrédients et attendre un délai de six mois avant de pouvoir lancer un produit représentait pour l’industrie des contraintes lourdes, tant du point de vue des services réglementaires que des équipes marketing.
Il a donc été décidé que le CSSC effectuerait une évaluation de la sécurité des nano-ingrédients les plus fréquemment utilisés : une fois jugés sûrs d’emploi, ils pourraient figurer dans la liste des ingrédients autorisés, et être ainsi dispensés de la notification préalable.

C’est bien sûr le cas du nano-dioxyde de titane.
Il a donc été évalué par le Comité d’experts, qui a rendu son Opinion à son sujet en juillet 2013. Conclusion : “L’emploi du TiO2 en tant que nanomatériau à une concentration maximale de 25 %, en tant que filtre UV dans les écrans solaires, peut être considéré comme ne posant aucun risque d’effets dangereux chez l’homme après application sur une peau en bonne santé, intacte ou ayant subi un coup de soleil”.

Cela sonne comme une autorisation de la substance. Elle est pourtant assortie de quelques réserves. Les experts ont limité leur Opinion à certaines formes de nano-dioxyde de titane, précisé que leur avis n’était pas valable pour “les applications qui pourraient conduire à une exposition par inhalation de nanoparticules de TiO2 (comme des poudres ou les produits en sprays)”, et souligné que “cette opinion [était] basée sur les données scientifiques actuellement disponibles, qui montrent une absence globale d’absorption des nanoparticules de TiO2 par la peau, [mais que] si de nouveaux éléments sont fournis plus tard qui montrent que les nanoparticules de TiO2 utilisées dans les formulations de crèmes solaires peuvent pénétrer la peau (en bonne santé, irritée ou abîmée) et atteindre des cellules saines, le CSSC pourrait envisager de reconsidérer son évaluation”.

Le nano-dioxyde de titane, filtre UV officiel

On croyait l’affaire pliée… mais, de rebondissements en rebondissements, elle était en fait loin d’être terminée.
C’est d’abord l’industrie qui a tenté d’obtenir la validation du CSSC pour une utilisation dans les produits en spray (terme que les experts scientifiques ont clarifier et expliciter pour fixer son champ d’application), ne serait-ce qu’à hauteur de 5,5 %.
Pendant ce temps, les études à charge continuent de s’accumuler, l’ANSES française propose une classification harmonisée du TiO2 en tant que cancérogène de catégorie 1B, ce qui menace à terme son utilisation dans les produits cosmétiques où les CMR sont interdits… Et ce n’est qu’en 2016 que le nano-Titanium dioxide fait son entrée dans l’Annexe VI du Règlement Cosmétiques et devient un filtre UV autorisé, sous réserve de respecter de nombreux critères de qualité… et toujours pas dans les sprays.

Mais l’affaire continue… Voilà le TiO2 officiellement classifié CMR, et parallèlement interdit dans l’alimentation. L’industrie cosmétique se bat pour sa défense et ne gagne que partiellement. Le nano-Titanium dioxide, bien que CMR, n’est pas interdit, mais il n’est autorisé dans les sprays qu’aux faibles concentrations jugées sûres par le CSSC : 1,4 % dans les produits à destination des consommateurs, 1,1 % pour un usage professionnel.
Et rien ne dit que ce soit là le dernier chapitre de la longue épopée du nano-TiO2…

LW
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