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mercredi 9 juillet 2014Cosmétothèque

Maison Dorin, ou l’art du maquillage

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La saga Dorin se poursuit avec cette seconde partie où nous allons découvrir une certaine logique dans le développement de cette marque. Elle est liée à deux aspects : les contraintes d’usage de l’époque à travers les voyages et les troupes de théâtre et la démocratisation du maquillage, d’une élite proche de la Cour vers une bourgeoisie naissante.

Temps de lecture
~ 7 minutes

À travers ce récit très inspirant, on pourra découvrir que déjà, à cette époque, toutes les parties du corps sont prises en charge, du cheveu en passant par les ongles, les mains, les jambes…avec un souci très prégnant de s’adapter au mode de vie. Et ceci est vrai pour les femmes comme pour les hommes.

Contexte historique

À travers l’histoire de l’une des plus anciennes maisons de maquillage, on comprend déjà à quel point le développement des produits cosmétiques a été guidé par l’usage, après les excès de la Cour de Versailles. À cette époque, les us et coutumes voulaient que seuls les élégant(e)s aient recours à des subterfuges pour embellir leur aspect physique. L'artifice et le grotesque prévalaient. Le mot maquillage est né avec un sens péjoratif de "tromper". Au début du XVIIIe, sous le règne de Louis XIV, le fard est de toutes les coquetteries. Il est fabriqué à partir de graisse de mouton et de différentes eaux de fleurs ainsi que du talc. La céruse (oxyde de plomb), produit très toxique, est largement utilisé pour blanchir le visage, le cou, les bras…L’important était d’avoir la peau la plus blanche possible, symbole de virginité et de pureté. Il permet aussi de dissimuler toutes les taches, les cicatrices, les rougeurs, les couperoses… L’esthétique est alors reine. Le roi est fardé de rouge et de rose, se pose des mouches, et les hommes suivent. Les perruques sont poudrées à outrance avec de la poudre d’os, et des racines d’iris et le maquillage est décliné sur tout le corps. La couleur rouge est obsessionnelle, présente partout (même sur les joues des morts) car elle est symbolise la jeunesse et la sensualité.

C’est la grande période des fards et des poudres et la maison Dorin offrira toute une palette de couleurs aux grands de ce monde. La période des encyclopédistes avec Diderot amorce un tournant en dénonçant tous ces artifices. Rousseau amplifiera cette tendance en faisant l’éloge d’un corps naturel et sain. Enfin, la Révolution va définitivement faire tomber l’Ancien Régime et, avec lui, tout un monde d’apparence outrageux. Puis l’hygiène apparaît et les habitudes changent. Le maquillage renaît chez les comédiennes et les demi-mondaines.

Chez Dorin, le maquillage a traversé les époques.

Dorin, le maquillage sous toutes ses formes

Les produits de la marque Dorin ont évolué avec les usages des troupes de théâtre au gré des époques. Celles-ci étant mobiles, il a fallu adapter les formules et surtout les contenants.

La saga des rouges à lèvres

Comme nous l’explique Hadi Nasri, le propriétaire de la marque Dorin, " Conçu au départ sous forme de pâte coulée dans des écrins de porcelaine, le rouge à lèvres va se transformer en bâtonnet, facile à transporter, d’esthétique plus contemporaine. Il est conditionné dans des cylindres de métal légèrement souple (fer ou étain), voire de papier métallisé semi rigide ".

Ces rouges "de poche" de la taille d’un briquet, d’une longueur de 4 cm environ, sont déclinés en plusieurs teintes comme rouge électrique, rouge éclatant, foncé…et sont numérotés selon les teintes (la collection s’étend jusqu’au n° 17, ce qui laisse supposer l’existence au minimum de 17 teintes).

C’est aussi l’époque des coffrets, ces boîtes métalliques associant une poudre à un bâtonnet de rouge à lèvres (début du 20 e siècle).

Dès 1930, l’influence du travail du métal se fait sentir avec une certaine effervescence graphique que l’on retrouvera dans les ouvrages de maquillage. Le rouge à lèvres a été un produit emblématique de la marque à tel point qu’aux États-Unis, elle est passée dans le langage courant. Ainsi, "give me a Dorine" signifiait "Donnez-moi un rouge à lèvres". À cette époque, tout ce qui rendait les lèvres rouges, s’appelait Deram (de Dorin).

En 1927, Rouge Baiser est le premier rouge à lèvres qui résiste à tout, même au baiser…Audrey Hepburn en fera son produit fétiche. Il se démocratise et de nombreuses marques proposent des gammes déclinées autour du rouge, travaillent de nouveaux concepts (two in one ; 1929).

Les poudres, l’autre spécialité de Dorin

Sous toutes les formes, libres ou compactes, de toutes les nuances, pour le corps, le visage, les jambes…, les poudres Dorin sont de tous les usages. " Aux États-Unis, toute une gamme de poudres avec différents parfums de fruits comme la framboise, la fraise constituent la gamme La Dorine" . Ces poudres seront ensuite à nouveau commercialisées en France. Elles sont conditionnées dans de petites boîtes en bois.

Chez Dorin, il existe aussi une exclusivité : le coffret shaker contenant quatre nuances de poudres. Il était possible de mélanger à sa convenance les différentes teintes. C’était déjà de la personnalisation de couleurs en fonction de sa carnation ! Ce qui montre l’avant-gardisme de la marque.

Ces poudres étaient des poudres de riz en provenance de diverses régions comme l’Alsace, la Lorraine ou, plus exotique, d’Irak, d’Égypte. Les noms sont déjà évocateurs : poudre du Nil, rose de Mossoul… et le slogan fortement vendeur : " Dorin existe dans tous les magasins du monde ; si vous trouvez un magasin sans les produits Dorin, signalez-le nous et nous vous offrirons un cadeau …"

Compactes ou fluides, les poudres Dorin sont utilisées aussi bien pour le corps que pour le visage et les mains. Celles pour les jambes sont spécifiques et se présentent comme une palette de peintre de différentes couleurs. Elles apportent un aspect "bas de soie". Le crayon noir qui accompagne la poudre permet de tracer la couture le long de la jambe. Cette poudre, appelée Bas de Soie, existe en 3 teintes : une pour le footing, une pour la ville et une pour le sport. Cette poudre de jambes se revendique résistante à la sueur, aux frottements de la robe et à l’eau. On retrouve ici le souci de la prise en compte de l’usage et du contexte d’utilisation des produits.

Les poudres pour les mains sont aussi des poudres de riz, très blanches. " Au total, il existe une centaine de références de couleurs, c’est une palette gigantesque pour l’époque" .

Les fards, inspirés du voyage

Fin du 19e, les fards se déclinent en trois couleurs : le blanc, le rouge et les autres couleurs pour l’univers du cirque. Les bâtons crayeux pour colorer le nez des clowns, ainsi que leurs maquillages étaient réalisés à partir des fards Dorin.

Vers 1930, les fards sont dédiés à l’univers du voyage. On trouve ainsi le même vocable que celui des poudres, avec rouge d’Alsace, rouge du Nil, de Mossoul… Les boîtiers sont en carton ou métalliques pour le transport. Le travail de décoration des boîtiers est déjà très ouvragé avec des univers qui peuvent nous apparaître comme désuets. Aujourd’hui, ces codes sont repris pour évoquer la tendance Flowers ou romantique.

Cette rétrospective vers l’une des plus anciennes maison de maquillage nous rappelle que l’innovation était déjà très présente et incontestablement tournée vers l’usage sans oublier l’esthétisme des décors.

Cette contribution a été réalisée par Michelle Vincent.

Diplômée de l’ENSAM Montpellier (aujourd’hui SupAgro)  en sciences des aliments, Michelle commence sa carrière comme ingénieur Qualité dans le groupement Intermarché. Au cours de cette première expérience, elle côtoie des PME et des filières amont de l’industrie agro-alimentaire. En  1993, le destin la conduit vers un univers plus glamour, celui des cosmétiques. Elle intègre Chanel à Neuilly sur Seine. Son challenge : mettre en place un laboratoire d’analyse sensorielle afin d’optimiser les galéniques des formules cosmétiques. En 2008, changement de cap pour la presse professionnelle en tant que directrice des rédactions. Parallèlement fin 2012, elle crée son cabinet conseil pour accompagner les entreprises dans le développement de méthodes d’évaluation cosmétique et de rédaction de contenu scientifique. Enfin, elle est enseignante à l’ISIPCA sur des modules de développement durable, RSE, filière du naturel. Elle collabore à la Cosmétothèque® depuis sa création.

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