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mardi 27 mars 2018Cosmétothèque

Utilisation moderne de la lumière dans la beauté

La lumière et la peau

L’utilisation des techniques lumineuses dans le domaine de la beauté est connue depuis de nombreuses années. Au-delà des pratiques qui consistaient à s’exposer des heures entières au soleil dans l’espoir de voir ses cheveux s’éclaircir, les premières applications “modernes” ont été développées autour de techniques utilisant le laser ou encore la lumière pulsée. Toutefois, celles-ci présentent de telles spécificités qu’elles ne sont pas utilisables en dehors d’un contrôle précis des conditions d’application. Elles sont principalement réservées aux médecins ou à des cabines esthétiques avec du personnel qualifié et, jusqu’à un passé récent, certainement pas à domicile.

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L’anti-âge et autres applications concernant la peau

Toutefois, avec le temps, certains travaux ont permis de montrer une caractéristique intéressante de la lumière. Il s’agit de la capacité que présente la peau de fixer la lumière blanche. Cette lumière est d’un niveau d’intensité très inférieur au laser ou à la lumière pulsée, et donc beaucoup plus sûre à l’usage par des opérateurs peu entrainés. Cette énergie lumineuse est alors transformée par la peau pour activer des systèmes biologiques internes ou par le biais d’effets directs. Cette caractéristique a conduit à la mise au point d’une nouvelle technique s’intitulant la “photomodulation”.

Paradoxalement, c’est à la conquête spatiale que nous devons cette “photomodulation qui est devenue emblématique des technologies esthétiques douces. Tout commence quand la NASA découvre que les plaies cicatrisent difficilement en apesanteur. L’agence spatiale va alors investiguer plusieurs solutions pour trouver des moyens permettant d’améliorer cette question. Une technique en cours de développement va leur apporter une réponse. Cette technologie repose sur la LLLT (Low Level Laser Therapy). Certains travaux rapportent à l’époque l’obtention de résultats significatifs d’accélération de guérison de plaies en orbite ou du traitement des blessures infligées à l’équipage de sous-marin. Dans ce domaine, les premiers brevets datent de 1965.

La génération de la lumière par des LEDs permettra la mise au point d’appareils parfaitement stables. De la même façon que la plante utilise la chlorophylle pour convertir l’énergie du soleil en support tissulaire, les LEDs déclenchent des réactions photo-biochimiques intracellulaires et physiologiques qui activent la production de collagène dans la peau et stimulent l’ensemble des fonctions cellulaire. Le mode d’action est maintenant parfaitement connu. L’énergie lumineuse permet d’activer une enzyme spécifique de la chaîne des transporteurs d’électron, la cytochrome C oxydase, stimulant ainsi la production d’énergie biologique via une augmentation du taux d’ATP.

Ceci aboutit à une stimulation globale de l’activité cellulaire et plus spécifiquement au niveau de la peau, par une production accrue de macromolécules, le collagène en particulier. Cet effet est plus spécifiquement obtenu avec des longueurs d’onde correspondant à la couleur orange (660 nm). Le bénéfice est une amélioration de la qualité de la MEC (Matrice extra cellulaire ) par production de collagène. Plus récemment, une amélioration tissulaire au niveau du derme papillaire a été démontrée. La première indication sera donc l’antivieillissement.

Les propriétés d’autres bandes passantes ont été démontrées ultérieurement. C’est ainsi que la bande passante bleue (470 nm), par le biais de ses propriétés microbicides, trouve des applications dans le traitement des irrégularités de la peau, comédons, points noirs et pores élargis et de la purification.

Le proche infrarouge (880 nm) constitue également une bande passante intéressante. Elle stimule la réparation cellulaire. Cette bande passante suscite beaucoup d’intérêt pour le moment.

Les premières applications apparaitront à la fin des années 90. Ce seront des applications cabines autour de lampes spécifiques. Il s’agira de machines assez complexes, utilisables principalement dans un environnement cabine. Ces appareils se sont améliorés progressivement pour aboutir récemment à des applications assez performantes comme les dispositifs proposés récemment par Biophotas dans différents domaines.

Des masques utilisant ces techniques sont également proposés, mais préférentiellement à usage professionnel.

Entre temps, plusieurs applications permettant l’utilisation à domicile de ces techniques seront proposées. Parmi les premiers dispositifs de ce genre, on peut citer le Luminothérapiste™ de la marque Filorga ou les dispositifs proposés par la marque Talika. Ces dispositifs permettent de sélectionner plusieurs programmes en fonction du problème à traiter.

Filorga associe l’appareil avec un produit dont l’action est augmentée par la lumière. Cette activité avait été démontrée sur la production de macromolécules du derme qui était plus abondante en cas d’exposition à la lumière que sans. Nous sommes en 2012.

Quant à Talika, la marque utilise pour son appareil Light Duo, une lumière générée par des LED de puissance : 0.06 w, à 525 nm (action sur la pigmentation), 590 nm (action sur les rides), en mode pulsatile et- 630 nm (action sur les rougeurs, les rides).

La tendance actuelle consiste à associer ces techniques de luminothérapie avec d’autres applications pour obtenir des effets complémentaires. On peut citer un dispositif comme l’Activ’feel du programme I-Feel™ de la société Feeligold, associant la luminothérapie a l’électrostimulation, mais surtout le Patch FEELIGOLD™ lancé en Octobre 2017. Ce dernier dispositif est le plus intéressant. Il consiste en un dispositif basé sur une pile alcaline intégrée dans un timbre destiné à être appliqué sur la peau. Le générateur de tension permet de délivrer un courant de faible intensité au travers de la peau par l’intermédiaire d’un système d’électeurs de se trouvant dans le timbre (EP294347 A1). La caractéristique de ce dispositif réside dans le fait qu’un autorégulateur fait varier la tension délivrée par le générateur en fonction de la mesure en continu de la résistivité de la peau pour ajuster les choses. De plus un travail particulier a été mené sur la nature des matériaux utilisés rendant le dispositif parfaitement biocompatible. Enfin son prix d’obtention beaucoup plus abordable que les premiers dispositifs devrait le rendre d’un accès plus facile que les premiers dispositifs, exagérément couteux.

De leur côté, les sœurs Carita imaginent très tôt le concept de cosmétique instrumentale en dotant en 1960 l’esthéticienne d’instruments de beauté. Puis, en 2012, ce sera le Cinetic Lift Expert™, la machine professionnelle en cabine. Ce n’est qu’en 2017 que Carita lance son 1er appareil de beauté augmentée à domicile en ouvrant une nouvelle ère du soin avec My C.L.E.™ L’appareil professionnel jusque-là réservé à la cabine est à présent disponible à domicile et permet, grâce à quatre programmes sur-mesure, de délivrer une routine efficace. La technique combine deux énergies : les micro-courants et les LEDs.

Tout près de nous également (2017), la société Neutrogena a introduit un dispositif uniquement lumineux mais reposant sur le même principe, le Visibly Clear™. Ce produit est positionné assez spécifiquement sur les manifestations des peaux à problème (acné).

Note : On remarquera que dans tous les cas, les sociétés qui investissent ce terrain ne prennent pas ou peu position sur la question éminemment controversée dans l’état actuel des choses de l’effet de la lumière bleue sur le vieillissement. Les uns revendiquent que la lumière bleue est délétère principalement via les écrans informatiques à distance, avec comme cible biologique principale les yeux. Les autres que la lumière bleue est globalement un facteur de vieillissement dont il faut se protéger. Espérons que l’avenir nous permettra de faire la “lumière” sur cette question, à moins que, comme suggéré, il s’agirait bien de deux phénomènes distincts à traiter séparément. Affaire à suivre.

L’épilation

Une autre utilisation de la lumière concerne l’épilation. Les premiers dispositifs qui ont été utilisés recourraient à la technique du laser. Le principe est simple. L’appareil envoie un faisceau lumineux de haute intensité qui est absorbé par les pigments foncés (mélanine) de la tige et de la racine du poil. Au cours de son absorption, la lumière se transforme en chaleur et détruit le follicule. Mais une chose est sûre : l’épilation au laser (tout comme l’épilation électrique) est une opération délicate, en principe réservée aux médecins.

Cette technique du laser a assez rapidement évolué vers d’autres utilisant la lumière pulsée. Introduite dans les années 90, la lumière pulsée a obtenu sa première autorisation de mise sur le marché américain par la FDA en 1995. Si les lasers sont des sources de lumière monochromatique, la lumière intense pulsée (ou IPL) tient dans le spectre d’émission plus large (plusieurs longueurs d’ondes au lieu d’une seule avec le laser) de la lumière. Elle est moins spécifique que le laser, mais présente un spectre permettant d’atteindre plus de chromophores. Moins intense également, elle présente moins de risques, permettant une utilisation sécurisée. La lumière détruit uniquement le poil, entraînant à terme une quasi non-repousse de celui-ci. Dans le poil, c’est le pigment (la mélanine) qui va capter la lumière et ainsi chauffer. Depuis 2007, année de lancement du fameux E-One d’E-Swin, les épilateurs à lumière pulsée prévus pour une utilisation domestique n’ont cessé de se développer.

On trouve de nombreux appareils sur le marché. Voici une sélection non exhaustive.

On applique un épilateur en forme de pistolet sur chaque centimètre carré de peau à traiter. L’appareil envoie des flashs de lumière qui visent la mélanine, le pigment qui colore les poils. La lumière dissout les bulbes des poils en phase de repousse. Ce n’est douloureux. Mais ça ne fonctionne pas sur tous les types de poils. Les peaux noires ou bronzées, même aux UV, ne présentent pas assez de contraste avec la couleur des poils. Aucun résultat non plus sur les poils blonds, roux ou blancs !

La lumière pulsée est contre-indiquée sur les grains de beauté, les tatouages, en cas d’eczéma, de chimiothérapie, aux femmes enceintes ou qui allaitent.

Conclusions

Au travers d’un cheminement un peu compliqué, la photomodulation et les techniques d’épilations lumineuses se sont forgé une place qui est difficilement contestable, contribuant durablement à l’émergence d’une cosmétique instrumentale performante. Elles ont également ouvert un nouvel univers où la notion de cosmétique n’est pas nécessairement attachée à un pot de crème, formulation magistrale ou secret de grand-mères. Ne doutons pas qu’elles connaitront un développement significatif dans le futur, la digitalisation venant renforcer leur légitimité.

Contribution réalisée par Jean Claude Le Joliff
Biologiste de formation, Jean Claude Le Joliff a été un homme de R&D pendant de nombreuses années. Successivement en charge de la R&D, puis de la Recherche et de l’Innovation dans un grand groupe français de cosmétiques et du luxe, et après une expérience de création d’un centre de recherche (CERIES), il s’est tourné vers la gestion de l’innovation.
Il a été par ailleurs Professeur associé à l’Université de Versailles Saint Quentin (UVSQ) et reste chargé de cours dans le cadre de plusieurs enseignements spécialisés : ISIPCA, IPIL, ITECH, UBS, UCO, SFC etc.
Il est le fondateur de inn2c, société de conseil en R&D et Innovation. Consultant auprès de plusieurs sociétés internationales, il a participé activement à des projets comme Filorga, Aïny, Fareva, et bien d’autres.
Il a créé la Cosmétothèque®, premier conservatoire des métiers et des savoirs faire de cette industrie.

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