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mercredi 10 avril 2019Congrès

Histoire de l’art et de la beauté : une proximité millénaire

Art et cosmétique

“Quand l’art inspire l’innovation cosmétique” a été le thème retenu pour la 10e édition du concours étudiant U’Cosmetics. Si le sujet paraît extrêmement vaste, le rapport entre art et cosmétique est loin d’être nouveau. Depuis toujours, les canons de beauté et d’esthétisme s’inspirent largement des courants artistiques et des modes de l’époque. À l’occasion du colloque organisé en marge du concours, Laëtitia Tetedoux, dirigeante de TTdo Marketing, et Ariane Goldet, Rédactrice de Beauté Forme et Santé, ont proposé un petit voyage dans le temps afin de voir comment l’art a inspiré et inspire toujours la cosmétique.

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“Au fil des siècles, l’idéal de beauté change. Il fluctue entre un désir d’artificiel et un goût prononcé pour le naturel. Mais ce qui ne change pas , c’est que, de tout temps, hommes et femmes ressentent le besoin d’adhérer à un certain esthétisme. Les supports d’inspiration changent à travers le temps, mais l’aspiration au beau reste la même”, introduit Ariane Goldet.

Le Moyen-Âge

À cette époque, la beauté est un don de Dieu. Une grâce à laquelle il ne faut pas toucher. Hors de question, donc, de modifier l’œuvre du Divin.
“Dans les portraits que l’on voit des femmes à cette époque, on constate qu’on ne voit que leur visage. Les robes amples recouvrent les épaules, les bijoux cachent leur peau qui se devaient d’être d’une blancheur extrême”, précise Ariane Goldet.
Pourtant, les femmes commencent à se libérer de cette rigueur à la fin du Moyen- ge en s’épilant le front et en colorant leurs lèvres avec des pommades (faites à base de carmin de cochenilles).
“C’est à ce moment-là que le métier d’apothicaire apparaît”, reprend Laëtitia Tetedoux. “On voit bien aujourd’hui que les codes de cette profession sont repris par certaines marques comme Garancia ou Mademoiselle Agathe. On remarque aussi cette mode à travers les packagings bruns, en verre, et un retour à l’herboristerie d’antan”.

La Renaissance

La beauté devient calculée et mathématique grâce à la notion de nombre d’or et de divine proportion.
Les sculpteurs sont passionnés par la physionomie, les bonnes mesures pour les traits les plus harmonieux possible.
“Les femmes veulent donner l’illusion de la perfection. Elles deviennent belles pour plaire”, rapporte Ariane Goldet.
Cette quête de symétrie n’est pas tombée en désuétude aujourd’hui, loin de là.
Désormais, on parle de contouring avec des égéries telles que Kim Kardashian qui ont démocratisé cette technique de maquillage. Il s’agit de travailler les ombres du visage afin de créer une illusion de symétrie et d’homogénéité des traits.

La royauté

Surnommé “le roi le plus doux fleurant”, Louis XIV est connu pour son goût des cosmétiques. Il a démocratisé le teint poudré, pour cacher son âge et même ses expressions, ainsi que les lèvres rougies.
“Si l’on se fardait autant le visage, c’était pour sembler parfait et gommer les irrégularités de peau. Cette tendance est expliquée aujourd’hui par des travaux effectués par le CNRS et la théorie du triangle d’or”, détaille Laëtitia Tetedoux. “Si le visage paraît uniforme, il va y avoir une perception instantanée, par le cerveau, de la beauté. L’idée de camoufler ses imperfections est liée à ce renvoi d’esthétisme. De nos jours, on a pu assister à l’explosion des poudres de riz, correcteurs et autres blurs, pour flouter le teint et gommer les irrégularités de la peau. Petite coquetterie du siècle aussi, avec les mouches qui avaient un sens selon l’endroit où elles étaient placées. Cette mode a été remise au goût du jour par quelques maquilleurs et l’on voit même des kits pour se créer de faux grains de beauté ou de fausses taches de rousseur !”

La fin de la royauté marque un tournant “cosmétique”.
Les révolutionnaires arrachent les perruques poudrées et vont bannir le fard, symbole de l’ancien régime.

Le 19e siècle ou “l’art de séduire”

“On remarque deux modes bien distinctes à cette époque. D’un côté, la bourgeoise molle et vertueuse, avec une silhouette maternelle exagérée et des bras ronds. De l’autre, on trouve la ‘belle malade’ qui affiche une mine de dépressive au seuil du précipice, comble de la distinction. Plus vous étiez blafarde, mieux c’était. Pour se faire, les femmes buvaient du vinaigre, se privaient de sommeil pendant des jours et ingéraient des drogues à base de belladone. En plus de cultiver ce teint cadavérique, certaines se noircissaient également les cheveux”, raconte Ariane Goldet. “Ce qui n’est ni plus ni moins que le mouvement néo-gothique que l’on connaît aujourd’hui”, reprend Laëtitia Tetedoux, “La beauté devient austère, les traits doivent disparaître au profit d’une esthétique plus baroque”.

La révolution industrielle

Entre l’apparition de l’ampoule électrique, des premiers studios photos, la naissance de Vogue aux USA, l’écriture de “l’Éloge du Maquillage” par Baudelaire ou encore les débuts de la chirurgie esthétique, l’époque est propice à toutes les coquetteries.
“Dans les innovations majeures du 19e, il faut impérativement citer la première couleur de synthèse par William Perkin en 1856. Alors qu’avant on utilisait des colorants végétaux ou animaux, Perkin trouve par hasard le moyen de faire du mauve synthétiquement. Cette découverte va révolutionner l’industrie textile et cosmétique”, affirme Ariane Goldet.

Le 20e siècle

Après la guerre de14-18, ce sont les années folles, marquées par un retour au romantisme. “Les motifs floraux s’invitent un peu partout dans l’art, mais également sur les packagings des cosmétiques comme chez Patyka et Ditptyque. On remarque d’ailleurs que ce courant revient à la mode puisqu’on voit des fleurs partout sur Instagram et Pinterest”, rapporte Laëtitia Tetedoux,
Mais c’est également la pleine période de l’Art Déco. Le trait devient un peu plus dur. “On remplit des zones de couleurs, c’est un peu les prémices du cubisme”, indique-t-elle. “Beaucoup de marques se sont inspirées et s’inspirent de cette esthétique, à l’image des packagings Studio Line de L’Oréal”.

La conquête du 7e art

L’invention du cinéma a vu arriver de grandes stars telles que Marlène Dietrich. Sourcils dessinés, regard intense, maquillage prononcé : il n’en faut pas plus pour que toutes les femmes s’identifient et veulent ressembler à ces égéries.
La cosmétique est donc, à cette époque, un moyen d’y parvenir.

De la couleur !

Les années 50 marquent l’avènement du skincare. La beauté redevient un peu plus naturelle, mais tout est très calculé. “L’élégance avant tout ! C’est la beauté à la Grace Kelly qui inspire la gent féminine”, rappelle Ariane Goldet.

Tournant dans les années 70, on assume beaucoup plus la couleur avec le mouvement pop art.
La tendance hippie, à la même époque, remet les motifs floraux à la mode. “Un grand nombre de marques reprennent à leur compte ces codes festifs, joyeux et colorés, comme Lush ou Khiel’s. L’industrie de la beauté souhaite montrer que la cosmétique est un moment de plaisir et de fête”, souligne Laëtitia Tetedoux.

La couleur ne suffit plus aux années 80, il est temps de passer au fluo !
Des personnalités comme Madonna, Boy Georges ou Jean-Paul Goude mettent à l’honneur une esthétique très flashy, qui inspire le maquillage.

La cosmétique contemporaine n’a de cesse de puiser son inspiration dans toutes les formes d’art, qu’il soit pictural, cinématographique ou autre.
La beauté évolue grâce aux avancées technologiques, mais les modes et les problématiques de soin restent les mêmes.
Coco Chanel disait “la mode, c’est ce qui se démode”, c’est également valable en cosmétique !

JS
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