Depuis l’entrée en vigueur en 2013 du Règlement Cosmétiques 1223/2009, les allégations cosmétiques sont sous tension et ne cessent d’être scrutées sous l’angle des Critères Communs qu’elles doivent respecter pour pouvoir être utilisées. Plusieurs d’entre elles, ciblées comme étant dénigrantes voire mensongères, ont fait l’objet de vifs débats. L’industrie a craint un encadrement plus strict avec une liste limitative d’allégations autorisées, à l’instar de ce qui se pratique en alimentaire. La menace n’est toujours pas totalement exclue, même si elle semble aujourd’hui contenue grâce à l’autorégulation et à ses nouvelles règles, applicables depuis le 1er juillet 2019.
Au-delà des principes déjà connus, elles ont institué un cadre très restrictif, notamment pour les allégations “Sans…” ou “Hypoallergénique”, qui en sont devenues quasiment toutes impossibles à afficher sur les packagings et dans les publicités pour les produits cosmétiques. Comment faire sans les allégations “Sans…” ? Quelles revendications s’interdire et par quoi les remplacer ? Comment les autorités de contrôle peuvent-elles sanctionner les non-conformités en la matière ?
Plus récemment, la vague des législations en faveur de la préservation de l’environnement, comme en France la loi AGEC, ont apporté leur lot d’allégations interdites supplémentaires… et quand bien même c’est la tendance du moment, il est bien difficile de se revendiquer respectueux de la planète, parfois tout à fait interdit de mettre en avant qu’un produit est biodégradable, même s’il l’est en réalité…
Toutes les dispositions applicables aux allégations, leur élaboration et leurs motivations, les dates butoirs, les débats qu’elles ont suscités et les conseils pour bien les interpréter sont réunies dans ce dossier.
La base de la réglementation européenne
Issus de l’Article 20 du Règlement Cosmétiques 1223/2009 qui stipule que “le consommateur devrait être protégé des allégations trompeuses concernant l’efficacité ou d’autres caractéristiques des produits cosmétiques”, deux textes fondateurs encadrent l’utilisation des allégations cosmétiques et sont applicables depuis juillet 2013. Le Règlement 655/2013 établissant les Critères Communs auxquels les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent répondre pour pouvoir être utilisées, et les Lignes directrices qui l’accompagnent, constituent la base des principes à respecter. Même s’il est apparu qu’ils n’étaient pas suffisants à eux seuls, puisqu’ils ont été complétés récemment par d’autres textes, ils imposent déjà de nombreuses limitations et restrictions à l’utilisation de certaines allégations.
Les allégations en discussion
Très vite après leur entrée en application, il est apparu que les Critères Communs étaient assez diversement respectés par les fabricants de produits cosmétiques. Les allégations “Sans…” notamment, que certains s’interdisaient au nom de l’équité ou de la conformité avec la législation, alors que d’autres continuaient de les utiliser largement, ont cristallisé de nombreuses tensions au sein-même de l’industrie. D’autant qu’une épée de Damoclès planait sur toutes les têtes : l’évaluation du respect des Critères Communs par la Commission européenne, le rapport qu’elle devait présenter en 2016 pouvant mener à l’adoption d’une réglementation beaucoup plus restrictive si les pratiques étaient jugées par trop insatisfaisantes. Et elles l’ont été en partie, particulièrement pour les allégations “Sans…” ou “Hypoallergénique”. Ce qui a motivé l’élaboration pour elles de nouvelles règles complémentaires au travers du Document Technique sur les allégations cosmétiques.
Entre réglementation et autorégulation
Face à la menace d’un cadre très contraint, l’industrie cosmétique, ou du moins ses représentants et fédérations nationales et européennes, ont décidé d’agir. Si la réglementation ne suffisait pas à assainir les pratiques du marché, l’autorégulation imposée pourrait peut-être y parvenir. En France, les nouvelles règles édictées par le Document Technique européen sur les allégations cosmétiques ont été transposées dans la Recommandation “Produits Cosmétiques” de l’ARPP, qui s’impose à tous les acteurs du secteur. Ces mêmes règles devraient également être implémentées, d’une façon ou d’une autre, dans la plupart des pays européens.
Beaucoup espéraient que cela marque le début d’une nouvelle ère dans la communication cosmétique : la fin définitive des allégations “Sans…” et la généralisation d’un discours positif à l’attention des consommateurs, dont il s’agissait de regagner la confiance. Même si, dans les faits, l’application de ces nouvelles règles dépend beaucoup de l’interprétation qu’en font les autorités de contrôle du marché. Mais encore aujourd’hui, les “Sans…” n’ont pas tout à fait disparus, ni les débats qu’ils suscitent.
Mais au fil du temps, d’autres types d’allégations se popularisent, au gré des effets de mode, par exemple celles en rapport avec l’éviction des ingrédients issus d’animaux ou avec le respect du microbiote cutané.
Les allégations environnementales
Tout dernier chapitre, encore en cours d’écriture, sur ce que les allégations ont le droit dire ou pas : les références aux caractéristiques environnementales des produits et/ou des emballages. Là encore, le but des réglementations comme la loi AGEC en France, ou d’autres équivalentes à l’international, est le souci de ne pas tromper le consommateur au regard des préoccupations de plus en plus fortes liées au changement climatique, aux substances et matériaux polluants ou persistants, à la neutralité carbone, au développement durable… La cadre est posé, certaines allégations dores et déjà interdites, d’autres utilisables seulement si elles sont dûment et précisément justifiées… Mais c’est encore en grande partie un “Work in progress”, qui s’élabore nouvelle loi après nouvelle loi, décret d’application après décret d’application, et dans l’attente encore des interprétations des autorités de contrôle…